• La société d exercice libéral est seule titulaire de la patientèle 

 

Par Anne-Cécile Lemoigne, article mis en ligne le 23 janvier 2024

 

Dans un arrêt récent (Cass, ch civile 1, 15 novembre 2023, n°21-17500), la Cour de cassation rappelle que la patientèle est attachée à la SEL et non aux médecins qui en sont membres.

 

M, un associé d'une SELARL ayant pour objet l'exercice libéral de la profession de médecin généraliste, qui avait quitté la société, reprochait à  son ancien associé d'avoir détourné ses patients en longue maladie dont il était le médecin référent et avait formé une action en concurrence déloyale.

 

Le médecin reprochait à la cour d'appel  de Nouméa d'avoir rejeté ses demandes et d'avoir violé l'ancien article 1382 du Code civil applicable au litige et la convention médicale de 2006 "...en retenant qu'une société d'exercice était seule titulaire de la clientèle, pour refuser tout caractère fautif au comportement d'un médecin qui, après le départ de son associé, avait refusé de communiquer les coordonnées de ce dernier aux patients de longue durée dont il était le médecin référent et s'était borné à leur remettre un formulaire destiné à changer de médecin référent."

 

La Cour de cassation, confirmant l'arrêt de cour d'appel,  considère que « ...c’est à bon droit  que la cour d’appel a énoncé que la patientèle était celle de la SELARL même si M. avait été désigné par des patients en longue maladie comme médecin référent » et jugé que «  le moyen qui déduit l’existence d’un comportement fautif de M. [S] du caractère propre de la patientèle attachée au médecin référent (était ) inopérant…»

 

En effet rappelons que la SEL a pour objet l’exercice en commun de la profession libérale, principe qui résulte de l’article 1er de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 qui régit les sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, dont les SEL

 

En d’autres termes, la société d’exercice libéral (à l’instar de la société civile professionnelle) exerce juridiquement la profession au travers de ses membres.

 

L’ordonnance n° 2023-77 du 8 février 2023 relative à l'exercice en société des professions libérales réglementées, qui doit entrer en vigueur le 1er septembre 2024, maintient ce principe en prévoyant en son article 40, alinéa 2 que « Ces sociétés ne peuvent exercer la profession qui constitue leur objet social que par l'intermédiaire d'un de leurs membres ayant qualité pour exercer cette profession."

 

En conséquence, les associés membres de la société d’exercice n’ont pas de clientèle propre, susceptible d’être détournée.

 

Toutefois, cette position de la Cour de cassation ne remet pas en cause le principe selon lequel aucun médecin ne doit faire obstruction à la relation entre le médecin et le patient.

 

Rappelons que l’article R4127-6 du Code de déontologie médicale prévoit que

« Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l'exercice de ce droit. ».

 

Les commentaires du CNOM précisent que « Le patient qui s’adresse à un médecin appartenant à une équipe médicale constituée est censé faire le libre choix des membres de l’équipe dont la composition doit lui être précisée ».

 

Ces dernières observations de l’ordre des médecins ne signifient pas qu’il puisse être fait obstacle à la communication des coordonnées du médecin partant d’une société d’exercice à ses  patients qui en font la demande.

 

 

 

 Parution d’une loi visant à faire évoluer la formation de sage-femme

 

La loi n°2023-29 du 25 janvier 2023, publiée au JO du 26 janvier 2023, adapte la formation de sage-femme aux évolutions de la profession.

 

La profession de sage-femme souffre d’une reconnaissance insuffisante, et ce alors même que cette profession est intégrée aux professions médicales par le Code de la santé publique.

 

La profession a connu une diversification de ses compétences : exercice au sein de maisons de naissance, suivi gynécologique des femmes, participation à des expérimentations d’IVG instrumentales en milieu hospitalier, PMA, élargissement des compétences en matière de vaccination etc….

 

La loi prévoit ainsi :

 

  • l'intégration obligatoire des écoles de sages-femmes à l'Université;

 

  • la création d'un 3ème cycle des études de maïeutique, qui aboutira après validation et soutenance d'une thèse d'exercice, à la délivrance d'un diplôme d'Etat de docteur en maïeutique; le référentiel de formation ainsi que la durée de ce 3ème cycle sont fixés par voie réglementaire;

 

  • la révision des référentiels de formation des 1ers et 2ème cycles des études pour la rentrée universitaire 2024;

 

la réforme s’applique aux étudiants qui débutent la deuxième année du premier cycle des études de maïeutique après le 1er septembre 2024.

 

  • l'intégration de l'activité de sage-femme au groupe 86-2 de la norme d'activité française (NAF) qui compte déjà les médecins et les chirurgiens-dentistes (une classe "86-24 -Activité des sages-femmes" est créée à cet effet) ce qui la reconnait comme activité de pratique médicale et permet ainsi une mise en conformité avec le Code de la santé publique ;

 

  • la création d'un statut de sage-femme agréée maître de stage des universités;

 

  • des dispositions propres aux enseignants-chercheurs en maïeutique 

 

  • L'exercice infirmier en pratique avancée est réglementairement encadré  (Mis à jour au 22 juillet  2023)

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Cinq textes, publiés au JO du 19 juillet 2018, sont venus initialement encadrer réglementairement la profession d'infirmier en pratique avancée (IPA).

 

Ce dispositif réglementaire a été, par suite, complété par différents décrets et arrêtés publiés en 2019,2021 et 2022.

 

s’agissant des infirmiers en pratique avancée exerçant en libéral, les modalités d’exercice professionnel et les modalités de valorisation de l’accompagnement par l’IPA des patients orientés par le médecin (qui prennent la forme de forfaits, majorations et frais de déplacement ) initialement fixées  par l’avenant n°7 à la convention organisant les rapports entres les infirmiers libéraux et l’assurance maladie et la décision de l’UNCAM du 13 février 2020 ont été modifiées par l’avenant n°9 à la convention nationale publié au JO le 18 novembre 2022 et par la décision de l’UNCAM du 8 février 2023 publié au jo du 16 mars 2023. 

 

Par ailleurs, l’infirmier en pratique avancée a fait l’objet, par deux décrets du 12 mars 2020 , d’une reconnaissance statutaire de son exercice à l’hôpital, d’une part par la création du corps des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée de la fonction publique hospitalière et d’autre part, par la fixation de l’échelonnement indiciaire applicable aux membres de ce corps.

 

Un décret du 30 mars 2020 intègre ce corps de la fonction publique hospitalière parmi ceux qui sont éligibles au versement d'une prime spécifique. Le dispositif relatif à cette prime spéciale a été réglementairement fixé en mars 2022

 

 L'infirmier exerçant en pratique avancée dispose de compétences élargies, par rapport à celles de l'IDE, validées par le DE d'infirmier en pratique avancée, reconnu au grade de master.

 

Selon l'exposé des motifs du projet de loi relatif à la santé, "(...) il s'agit, à partir du métier socle de permettre, dans des conditions qui seront définies par voie règlementaire, un élargissement du champ des compétences vers, par exemple, la formulation d’un diagnostic, la réalisation d’une analyse clinique, l’établissement de prescription, ou l’accomplissement d’activités d’orientation ou de prévention.(...)".

 

Le Ministère des Solidarités et de la Santé précise que "(...)La pratique avancée vise un double objectif : améliorer l'accès aux soins ainsi que la qualité des parcours des patients en réduisant la charge de travail des médecins sur des pathologies ciblées.(...)".

 

C'est l'article 119 de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé qui a créé l'article L.4301-1 du CSP introduisant le principe de la pratique avancée des auxiliaires médicaux et renvoyé la définition par décret pour chaque profession :

 

-des domaines d'intervention en pratique avancée;

 

-des conditions et des règles de l'exercice en pratique avancée;

 

-de la nature du diplôme et de ses modalités d'obtention.

 

Les conclusions du Ségur de la santé, concertation engagée avec les représentants du système de santé suite à la crise sanitaire du COVID-19, comprennent une mesure 6 prévoyant d'"Accélérer le déploiement des infirmiers en pratique avancée (IPA)".

 

Cette mesure prévoit de :

 

-"renforcer le rôle de premier recours des infirmiers en pratique avancée, en permettant aux patients de les consulter directement et en élargissant leur périmètre d’action";

 

-"simplifier l’accès à la formation et au métier d’infirmier de pratique avancée et augmenter le nombre de places de formation avec pour objectif 3000 infirmiers de pratique avancée en 2022, puis 5000 en 2024...".

 

 L'instruction du 26 n°DGOS/RH4 /DGCS/ 4 B /2021/168 du 26 juillet 2021 relative à la mise en oeuvre des mesures sur la sécurisation des organisations et des environnements de travail résultant de l'accord du "Ségur de la santé" pour la fonction publique hospitalière prévoit le renforcement des effectifs des métiers les plus en tension.

 

Les IPA  en font partie compte tenu "..des besoins recensés et pour accompagner la mesure correspondante du Ségur de la santé."

 

 

La  loi n°2023-379 du 19 mai 2023 portant amélioration de l'accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé  dite "Loi Rist’ entend revaloriser la pratique avancée infirmière en lui permettant la primo-prescription de produits de santé et de prestations soumis à prescription médicale obligatoire et en autorisant dans certaines conditions  l’accès direct aux IPA .

 

I.Le cadre d'intervention

 

Selon les dispositions légales, les auxiliaires médicaux peuvent exercer en pratique avancée:

 

-au sein d'une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant (par exemple maison ou centre de santé) ou d'une équipe de soins d'un centre médical du service de santé des armées coordonnées par un médecin des armées;

 

-au sein d'une équipe de soins en établissements de santé, en établissements médico-sociaux, ou en hôpitaux des armées coordonnée par un médecin;

 

-en assistance d'un médecin spécialiste, hors soins primaires, en pratique ambulatoire.

 

 

II Les domaines d'intervention ouverts à l'exercice infirmier en pratique avancée

 

Le décret n°2018-629 du 18 juillet 2018 relatif à l'exercice en pratique avance avancée, prévoyait à l'origine trois domaines d'intervention ouverts à l'exercice infirmier en pratique avancée à savoir :

 

-les pathologies chroniques stabilisées; prévention et polypathologies courantes en soins primaires;

 

-l° oncologie et hémato-oncologie;

 

-la° maladie rénale chronique, dialyse, transplantation rénale.

 

Le décret n°2019-835 du 12 août 2019 relatif à l'exercice infirmier en pratique avancée et à sa prise en charge par l'assurance maladie ajoute un nouveau domaine d'intervention, la psychiatrie et santé mentale.

 

Le décret n°2019-836 du 12 août 2019 prévoit que les titulaires du DE d'infirmier de secteur psychiatrique peuvent prétendre à la formation conduisant au DE d'infirmier en pratique avancée mais exclusivement en vue de l'obtention de la mention psychiatrie et santé mentale.

 

Le décret n°2021-1384 du 25 octobre 2021 ajoute" les urgences " comme autre domaine d'intervention des infirmiers en pratique avancée.

 

La mention correspondant au domaine d'intervention est inscrite dans le DE d'infirmier en pratique avancée délivré.

 

Un arrêté ministériel du 18 juillet 2018 fixe la liste des pathologies chroniques stabilisées évoquées ci-avant (voir liste) .

 

 

III. Les conditions à remplir par l'infirmier pour être autorisé à exercer en pratique avancée

 

Selon les dispositions du décret n°2018-629 du 18 juillet 2018 précité (article D.4301-9 du CSP), trois conditions doivent être remplies par l'infirmier:

 

-1° obtenir le DE d'infirmier en pratique avancée dans la mention correspondant au domaine d'intervention;

 

Les conditions d'obtention de ce diplôme sont prévues par le décret n°2018-633 relatif au DE d'infirmier en pratique avancée et par l'arrêté du 18 juillet 2018 relatif au régime des études en vue du DE d'infirmier en pratique avancée, arrêté modifié par l'arrêté du 12 août 2019.et par l'arrêté du 22 octobre 2021.

 

Il est à noter que l'inscription à la formation du DE d'infirmier en pratique avancée nécessite au préalable l'obtention du DE d'infirmier ou d'une équivalence européenne.

 

Par ailleurs des dispositifs de validation des acquis de l'expérience et des connaissances déjà acquises par les infirmiers seront mis en place par les universités.

 

-2°justifier de 3 années minimum d'exercice en équivalent temps plein de la profession d'infirmier;

 

-3° être enregistré auprès du service ou de l'organisme désigné à cette fin par arrêté ministériel

 

IV Les ressortissants d'un Etat membre de l'UE ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'EEE autorisés à exercer en pratique avancée

 

Un décret n°2019-510 du 23 mai 2019, entré en vigueur le 1er septembre 2019, précise les modalités selon lesquelles un professionnel de santé infirmier de pratique avancée ressortissant d’un Etat membre de l’UE ou d’un Etat partie à l’EEE et titulaire d’un titre de formation de pratique avancée dans un de ces Etats peut faire reconnaître ses qualifications professionnelles en vue d’un exercice en pratique avancée en France :

 

-soit dans le cadre de la délivrance, par le préfet de région après avis d’une commission, dans les conditions prévues aux articles L.4311-4 et R.4311-34 à R.4311-37 du CSP, d’’une autorisation individuelle d’exercer la profession d’infirmier en pratique avancée en France (libre établissement) ’;

 

-soit dans le cadre de la procédure de déclaration préalable de prestations de service réalisées en France (exécution d’actes professionnels, de manière temporaire et occasionnelle par un ressortissant européen établi et exerçant légalement dans l’un des Etats concernés la profession d’infirmier) dans les conditions prévues à l’article L.4311-22 du CSP (libre prestation de service).

 

 

V. Le rôle de l'infirmier exerçant en pratique avancée

 

Le rôle de l'infirmier exerçant en pratique avancée est précisé par les dispositions du décret n°2018-629 du 18 juillet 2018 (codifiées aux articles R.4301-1 à R.4301-7 du CSP).

 

L'infirmier en pratique avancée participe à la prise en charge globale des patients dont le suivi lui est confié par un médecin, après concertation avec le ou les infirmiers exerçant en pratique avancée et examen du dossier médical.(article R4301-5) 

 

Cette prise en charge par l'IPA nécessite l'accord des patients concernés qui se voient remettre un document d'information dont le contenu est fixé par l'article R4301-6.

 

La conduite diagnostique et les choix thérapeutiques sont définis par ce médecin et mis en oeuvre dans les conditions réglementaires fixées par le décret précité, qui précise notamment :

 

-les compétences de l'infirmier en pratique avancée (voir ci dessous) .

 

- la teneur du protocole d'organisation du travail en équipe entre le(s)  médecins et le(s )infirmier(s) en pratique avancée (voir ci-dessous)

 

Dans le respect du parcours de soins du patient coordonné par le médecin traitant, l'infirmier exerçant en pratique avancée apporte son expertise et participe, en collaboration avec l'ensemble des professionnels concourant à la prise en charge du patient, à l'organisation des parcours entre les soins de premier recours, les médecins spécialistes de premier ou deuxième recours et les établissements et services de santé ou médico-sociaux

 

Lorsque l'infirmier exerçant en pratique avancée est amené à demander une consultation d'un médecin spécialiste correspondant dans le cadre du parcours de soins coordonné par le médecin traitant, le décret n°2019-835 du 12 août 2019 permet de ne pas majorer la participation de l'assuré. 

 

Au sein de l'équipe, l'infirmier exerçant en pratique avancée contribue à l'analyse et à l'évaluation des pratiques professionnelles infirmières et à leur amélioration ainsi qu'à la diffusion de données probantes et à leur appropriation. 

 

 Il participe à l'évaluation des besoins en formation de l'équipe et à l'élaboration des actions de formation. 

 

Il contribue à la production de connaissances en participant aux travaux de recherche relatifs à l'exercice infirmier.

 

 

VI. Les compétences de l'infirmier en pratique avancée

 

Les compétences de l'infirmier exerçant en pratique avancée  sont définies à l'article R.4301-3 du CSP, issu du décret 2018-629 du 18 juillet 2018 et par l'arrêté du 18 juillet 2018 fixant les listes permettant l'exercice infirmier en pratique avancée en application de l'article R.4301-3 du CSP.

 

L'article R4301-3 prévoit ainsi que :

 

"Dans le ou les domaines d'intervention définis à l'article R. 4301-2 inscrits dans son diplôme (...)  

 1° L'infirmier exerçant en pratique avancée est compétent pour conduire un entretien avec le patient qui lui est confié, effectuer une anamnèse de sa situation et procéder à son examen clinique ; 

 2° L'infirmier exerçant en pratique avancée peut : 

 a) Conduire toute activité d'orientation, d'éducation, de prévention ou de dépistage qu'il juge nécessaire ; 

b) Effectuer tout acte d'évaluation et de conclusion clinique ou tout acte de surveillance clinique et para-clinique, consistant à adapter le suivi du patient en fonction des résultats des actes techniques ou des examens complémentaires ou de l'environnement global du patient ou reposant sur l'évaluation de l'adhésion et des capacités d'adaptation du patient à son traitement ou sur l'évaluation des risques liés aux traitements médicamenteux et non médicamenteux ; 

 c) Effectuer les actes techniques et demander les actes de suivi et de prévention inscrits sur les listes établies par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Académie nationale de médecine ; 

 d) Prescrire :

-des médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire figurant sur la liste établie par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en application de l'article R. 5121-202 ; 

-des dispositifs médicaux non soumis à prescription médicale obligatoire dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Académie nationale de médecine ; 

-des examens de biologie médicale dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Académie nationale de médecine ;

 e) Renouveler, en les adaptant si besoin, des prescriptions médicales dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Académie nationale de médecine."

 

L'arrêté du 18 juillet 2018 précité fixe :

 

- la liste des actes techniques que l'infirmier exerçant en pratique avancée est autorisé à effectuer sans prescription médicale et, le cas échéant, à en interpréter les résultats pour les pathologies dont il assure le suivi ;

 

-la liste des actes de suivi et de prévention que l'infirmier exerçant en pratique avancée est autorisé à demander, pour les pathologies dont il assure le suivi;

 

-la liste des dispositifs médicaux non soumis à prescription médicale obligatoire que l'infirmier exerçant en pratique avancée est autorisé à prescrire;

 

-la liste des examens de biologie médicale que l'infirmier exerçant en pratique avancée est autorisé à prescrire pour les pathologies dont il assure le suivi.

 

-la liste des prescriptions médicales que l'infirmier exerçant en pratique avancée est autorisé à renouveler ou à adapter pour les pathologies dont il assure le suivi. (les produits de santé et les actes infirmiers).

 

Il résulte de l'examen de ces listes d'actes que l'IPA dispose "de compétences élargies entrant réglementairement dans le champ médical notamment en ce qui concerne le droit de prescription ", ainsi que le souligne la DGOS.

 

 Un arrêté du 12 août 2019 et un arrêté du  11 mars 2022 ont modifié les listes précitées , auxquelles il  convient de se reporter. (voir l'arrêté du 18 juillet 2018 dans sa version en vigueur après modifications  par les deux arrêtés du 12 août 2019 et 11 mars 2022 précités).

 

A titre d'exemple : 

 

En ce qui concerne les médicaments anti-cancéreux, l'arrêté du 12 août 2019 précise que le renouvellement ou l’adaptation de la prescription s’effectue dans le cadre d’une procédure écrite établie par le médecin.

 

L'arrêté du 11 mars 2022  complète notamment la liste des actes techniques que l'IPA est autorisé "à effectuer sans prescription médicale, et le cas échéant à en interpréter les résultats pour les motifs de recours et pathologies dont il assure le suivi". Désormais il donne  par exemple la possibilité à l'IPA de poser une sonde gastrique ou un cathéter veineux court.

Ce même arrêté précise également, dans le cadre de la liste précitée, les actes techniques qui peuvent être réalisés uniquement dans le cadre du parcours médico-paramédical du domaine d'intervention urgences, comme par exemple la pose d'une oxygénothérapie haut débit, d'une ventilation non-invasive

 

pour information , voir les dernières évolutions légales sur la possibilité légale de prescription de produits et prestations soumises à prescription médicale obligatoire.

 

VII Le protocole d'organisation du travail en équipe entre le(s)  médecins et le(s )infirmier(s) en pratique avancée

 

L'article R.4301-4 prévoit que "Dans le cadre du travail en équipe entre le ou les médecins et le ou les infirmiers exerçant en pratique avancée conformément à l'article R. 4301-1, un protocole d'organisation est établi. 

 

Ce protocole précise : 

 

1° Le ou les domaines d'intervention concernés ; 

 

 2° Les modalités de prise en charge par l'infirmier exerçant en pratique avancée des patients qui lui sont confiés ; 


3° Les modalités et la régularité des échanges d'information entre le médecin et l'infirmier exerçant en pratique avancée ; 

 

4° Les modalités et la régularité des réunions de concertation pluriprofessionnelle destinées à échanger sur la prise en charge des patients concernés ; 

 

 5° Les conditions de retour du patient vers le médecin, notamment dans les situations prévues aux articles R. 4301-5 et R. 4301-6. 

 

Le protocole d'organisation est signé par le ou les médecins et le ou les infirmiers exerçant en pratique avancée. Le modèle du document prévu à l'article R. 4301-6 (document d'information du patient), élaboré par le ou les médecins et par le ou les infirmiers exerçant en pratique avancée, figure en annexe du protocole. Le protocole est porté, le cas échéant, à la connaissance de l'ensemble de l'équipe de soins."

 

VIII Différenciation du rôle et des compétences de l'IPA exerçant dans le domaine d'intervention des urgences, selon la gravité ou la complexité des motifs de recours et des situations cliniques

 

Le décret n°2021-1384 du 25 octobre 2021 ajoute" les urgences " comme autre domaine d'intervention des IPA.

 

Il précise les modalités relatives à l'exercice en pratique avancée de la profession d'infirmiers, dans ce domaine d'intervention,, notamment la définition du lieu d'exercice, la création d'un parcours paramédical pour la prise en charge et les modalités d'information du patient.

 

Ces IPA ne peuvent intervenir que si l' activité d'urgences est exercée" par un établissement de santé disposant d'une autorisation d'activité de soins de médecine d'urgence."

 

Selon le décret précité, le rôle et les compétences des IPA ne sont pas les mêmes selon la gravité ou la complexité des motifs de recours et des situations cliniques.  

 

C’est un arrêté du 25 octobre 2021 qui fixe la liste des motifs de recours et les situations cliniques les plus graves ou complexes et la liste des motifs de recours et les situations cliniques présentant un moindre degré de gravité ou de complexité.

 

Deux cas de figure doivent ainsi être distingués :

 

1) pour les motifs de recours et les situations cliniques les plus graves ou complexes listés à l’arrêté précité, l'IPA du domaine d'intervention « urgences » participe, après décision du médecin de structure de médecine d'urgence et sous sa conduite diagnostique, à la prise en charge des urgences vitales ou complexes.

 

Dans ce cas, comme le décret le prévoit, le rôle et les compétences, tels que définis aux articles R.4301-1 et R.4301-3  du CSP (cf ci dessus les paragraphes V et VI de notre article) sont  applicables

 

2) par dérogation aux dispositions des articles R.4301-1 et R4301-3 du CSP, pour les motifs de recours et les situations cliniques présentant un moindre degré de gravité ou de complexité, également définis par l’arrêté, l'IPA est compétent pour prendre en charge le patient et établir des conclusions cliniques, dès lors qu'un médecin de la structure des urgences intervient au cours de la prise en charge. 

 

Dans ce 2ème cas, ce n'est pas le médecin qui informe le patient ( ou, le cas échéant,sa personne de confiance, son représentant légal ou ses parents s'il est mineur) des modalités de sa prise en charge par l'IPA par le biais du document prévu en annexe du protocole d'organisation  (cf paragraphe VII de notre article) mais l'IPA elle-même, qui remplit, signe et remet ledit document.

 

IX Les règles professionnelles et éthiques et la responsabilité

 

L'article L4301-1 du CSP prévoit que "Les règles professionnelles et éthiques de chaque profession, ainsi que celles communes à l'ensemble des professionnels de santé, notamment celles figurant aux articles L. 1110-4 et L. 1111-2 (concernant le partage d'informations et le secret médical), demeurent applicables sous réserve, le cas échéant, des dispositions particulières ou des mesures d'adaptation nécessaires prises par décret en Conseil d'Etat. "

 

Par ailleurs, la loi précise que l'infirmier agissant dans le cadre de la pratique avancée est responsable des actes qu'il réalise dans ce cadre.

 

Il est précisé par l'article R.4301-5 que  Lorsque l'infirmier exerçant en pratique avancée constate une situation dont la prise en charge dépasse son champ de compétences, il adresse le patient sans délai au médecin et en informe expressément ce dernier afin de permettre une prise en charge médicale dans un délai compatible avec l'état du patient."

 

 

X.L'obligation d'enregistrement auprès de l'ordre des infirmiers

 

Un arrêté du 12 août 2019 prévoit que l'infirmier exerçant en pratique avancée doit s'enregistrer auprès du conseil départemental ou interdépartemental de l'ordre des infirmiers de sa résidence professionnelle par déclaration au moyen d'un portail de téléservice sécurisé.

 

 

XI. Précisions réglementaires sur les prescriptions des infirmiers en pratique avancée

 

Le décret n°2019-835 du 12 août 2019 modifie les codes de la santé publique, de la sécurité sociale et de l'action sociale et des familles afin de permettre l'exécution des prescriptions émanant d'un infirmier exerçant en pratique avancée par une infirmière, un technicien de laboratoire d'analyses médicales, une pharmacie d'officine ou un service de soins infirmiers à domicile. 

 

Il permet également la prise en charge par l'assurance maladie d'une prescription de produit de santé émanant d'un infirmier exerçant en pratique avancée. 

 

XII Le dispositif conventionnel applicable aux infirmiers en pratique avancée exerçant à titre libéral

 

Un arrêté du 30 décembre 2019  a approuvé l'avenant n°7 à la convention nationale organisant les rapports entre les infirmiers libéraux et l’assurance maladie, conclu le 4 novembre 2019.

 

Cet avenant a pour objet de «…déterminer, pour les infirmiers en pratique avancée exerçant à titre libéral sous le régime conventionnel, les modalités de leur exercice professionnel ainsi que les modalités de valorisation associée. ..»

 

L’avenant prévoit que la convention nationale étend l’application de ladite convention « …aux infirmiers en pratique avancée exerçant à titre libéral qui ont fait le choix d’exercer sous le régime conventionnel en tant qu’activité exclusive en pratique avancée ou en tant qu’activité concomitante à une autre activité d’infirmier libéral (activité mixte).

 

Il prévoit également que « ..Ces infirmiers bénéficient en outre dans la convention nationale de dispositions spécifiques liées à leur statut particulier…»

 

Les modalités d’exercice professionnel et de valorisation ont été modifiées par l’avenant n°09 à la convention nationale évoqué ci -avant. et transcrites dans la NGAP par la décision de l'UNCAM du 8 février 2023

 

 

  • Le dispositif de régulation du conventionnement

 

Les IPA en exercice exclusif ne sont ni soumis au dispositif de régulation du conventionnement en zone surdotée, ni au dispositif d’encadrement de l’activité en zone intermédiaire ou très dotée en périphérie des zones surdotées.

 

En cas de reprise d’une activité d’infirmier libéral en soins généraux en complément de l’activité en pratique avancée (activité mixte) ou à la suite de la cessation de l’activité en pratique avancée, l’infirmier est soumis au dispositif de régulation du conventionnement en zones surdotées en application des dispositions de l’avenant n°6 (voir article 3-4)

  

  • Les forfaits

 

Les modalités de valorisation de l’accompagnement par l’IPA des patients orientés par le médecin initialement fixés par l’avenant n°7 à la convention nationale organisant les rapports entre les infirmiers libéraux et l’assurance maladie et par la décision de l’UNCAM du 13 février 2020 ont été revus et modifiés par l’avenant n°9 publié au JO du 18 novembre 2022 et par la décision de l’UNCAM du 8 février 2023 publiée au jo du 16 mars 2023 qui les transcrit dans la NGAP.

 

La prise en charge des patients par l’IPA est valorisée selon deux filières d’orientation du patient vers l’IPA :

 

-à titre principal, par l’orientation du patient par le médecin au titre d’un suivi régulier

 

-à titre secondaire, dans le cadre d’une prise en charge ponctuelle (bilan ou séance de soins ponctuel) sur orientation par un médecin.

 

 

L’IPA est rémunéré forfaitairement par trimestre de prise en charge. les modalités de facturation sont fixées comme suit

  • un premier forfait  dénommé « forfait d’initiation » valorisé à hauteur de 60 euros (PAI 6) facturable par l’IPA une fois lorsque le patient lui est confié par le médecin, au titre du premier contact réalisé en présentiel avec le patient et de la prise en charge au titre du 1er trimestre de suivi du patient.
  • un deuxième forfait dénommé  « forfait de suivi »valorisé à hauteur de 50 euros (PAI 5) facturable une fois par trimestre (à la suite du 1er trimestre de prise en charge et de la facturation du forfait d’initiation) dès lors qu’au moins un contact (en présentiel ou à distance) avec le patient a eu lieu au cours du trimestre au cours duquel le forfait de suivi est facturé.

Ces forfaits d’initiation et de suivi visent à valoriser toutes les interventions réalisées pour le suivi du patient (en présentiel ou en distanciel) au cours du trimestre de prise en charge.

 

ils comportent la vérification de l’éligibilité du patient au suivi par l’IPA, le bilan global ou la surveillance et les conclusions cliniques, les actions d’éducation, de prévention (dont la vaccination) d’orientation et de dépistage, l’activité de concertation et de coordination auprès des médecins et des autres acteurs de santé amenés à assurer la prise en charge de ces patients et les activités transversales.

 

L’IPA est autorisé à effectuer des actes sans prescription médicale. Ils ne peuvent donner lieu à facturation en sus du forfait.

 

 les majorations de nuit, dimanche et jour férié, MIE, MCI ET MAU ne sont pas associées à ces rémunérations forfaitaires.

 

Les demandes de téléexpertise sont comprises dans ces forfaits.

 

Au cours de la 1ère année, 4 forfaits (1 d’initiation et 3 de suivi) sont facturables au maximun par patient ; les années suivantes 4 forfaits de suivi sont facturables par année civile (un forfait de suivi par trimestre) et par patient dès lors qu’au moins un contact avec le patient a eu lieu au cours de ce trimestre. par dérogation au cours des deux premières années de prise en charge, 2 forfaits sont facturables par semestre dès lors qu’au moins deux contactes avec le patient ont eu lieu au cours du semestre.

 

  • La valorisation de la prise en charge ponctuelle par l’IPA

Cette prise en charge concerne un patient non régulièrement suivi dans le cadre de la pratique avancée Sur orientation du médecin, l’IPA peut réaliser chez ce patient un bilan ponctuel ou des séances de soins ponctuelles ;les comptes-rendus sont versés au dossier médical du patient partagé lors qu’il est ouvert

 

  • le bilan ponctuel est valorisé à hauteur de 30 euros (PAI 3) . Ce bilan réalisé obligatoirement en présence du patient, comprend une anamnèse, un examen clinique, la réalisation d’actes techniques le cas échéant, les mesures de prévention (secondaire ou tertiaire) d’éducation thérapeutique, de dépistage et d’orientation, l’élaboration de conclusion clinique et, le cas échéant, la réalisation de prescriptions autorisées par la réglementation

A l’issue du bilan, un compte rendu est adressé au médecin ayant orienté le patient vers l’IPA.

Ce bilan ponctuel peut être facturé au maximum une fois par année civile par patient

 

  • la séance de soins ponctuelle

Lorsque le patient est orienté de manière ponctuelle par un médecin vers l’IPA, ce dernier peut réaliser un ou plusieurs actes techniques relevant du champ de compétences propre de l’IPA selon la réglementation en vigueur.

 

Cette séance de soins ponctuelle est valorisée à hauteur de 16 euros( PAI 1,6) et peut être facturée au maximum 4 fois par année civile par patient en pratique avancée.

 

les majorations de nuit, dimanche et jour férié, MIE, MCI ET MAU sont associables aux séances

  • la majoration (MIP) dédiée, liée à l’age du patient (pour les patients de moins de 7ans et ceux âgées de 80 ans et plus) peut être associée à la facturation des différents forfaits et prises en charge ponctuelles précitées.

Cette majoration est valorisée à hauteur de 3,90 euros.

 

  • Facturation des frais de déplacement

 

Les frais de déplacement sont facturables  à chaque passage de l'IPA au domicile du patient dans les conditions définies à la NGAP '(indemnité forfaitaire infirmier (IFI) et éventuellement IK).

 

Ø  L’augmentation du forfait annuel d’aide à l’informatisation et à la modernisation

 

L’indicateur d’exercice coordonné du forfait annuel d’aide à la modernisation des pratiques professionnelles d’un montant de 100 € pour les infirmiers libéraux est porté à 400 € pour les IPA conventionnés, et jusqu’à 1120 € pour les IPA conventionnés exerçant en zone en sous-densité médicale.

 

Ø  Une aide financière de soutien du début d’activité des infirmiers en pratique avancée

 

 Une aide financière est prévue pour soutenir le démarrage de l’activité libérale des infirmiers en pratique avancée.

 

À noter : ces aides ne sont plus destinées aux seules IPA exclusives. Des dispositions transitoires ont été mises en place : dans le délai d’un an suivant la date de parution au Journal officiel de l’avenant 9 à la convention nationale, les IPA libéraux déjà en exercice peuvent bénéficier de ce nouveau contrat.

 

Le montant de l’aide varie selon que l’IPA exerce ou non en zone sous-dense médicale (voir détail page 11 de l’avenant n°9).

 

XIII Les mesures de valorisations applicables également aux centres de santé et maisons de santé pluriprofessionnelles salariant des IPA

 

La circulaire de la CNAM sus- précisait que « l’ensemble des mesures de valorisation prévues par l’avenant 7 pour le suivi des patients (forfaits, majoration MIP et frais de déplacement) s’appliquent également aux centres de santé et aux maisons de santé pluriprofessionnelles salariant des infirmiers en pratique avancée conformément aux dispositions des articles L.4041-2, L.4041-3 et L.4042-1° du CSP et des articles L.162-1-7 et L. 162-32-1 du code de la sécurité sociale. ».

 

il devrait en être de même pour les mesures de valorisation prévues par l’avenant n°9

 

XIV. La reconnaissance statutaire de l’exercice de l’infirmier en pratique avancée à l’hôpital

 

Le décret n°2020-244 du 12 mars 2020 portant statut particulier du corps des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée de la fonction publique hospitalière définit les modalités de recrutement, de nomination, et de classement dans le nouveau statut du corps des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée, classé dans la catégorie A de la fonction publique hospitalière, ainsi que les règles relatives à l’avancement, au détachement et à l’intégration directe.

 

Le décret n°2020-244 du 12 mars 2020 précité a été modifié par le  décret n°2021-1256 du 29 septembre 2021 revalorisant le déroulement de carrière des corps paramédicaux de la catégorie A de la fonction publique hospitalière, lequel est entré en vigueur le 1er octobre 2021.

 

Ce nouveau corps de la fonction publique hospitalière comporte deux grades : une classe normale comportant dix échelons et une classe supérieure comportant huit  échelons.

 

Le décret n°2020-245 du 12 mars 2020 qui  fixait initialement l'échelonnement indiciaire applicable aux membres du corps des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée  a été abrogé et remplacé par le décret n° 2021-1259 du 29 septembre 2021

 

Le décret n°2020-369 du 30 mars 2020 ajoute le corps des auxiliaires médicaux en pratique avancée à la liste des corps de la fonction publique hospitalière éligibles au versement d'une prime spécifique.

 

Pour ce faire, ce décret modifie le décret n°88-1083 du 30 novembre 1988 relatif à l'attribution d'une prime spécifique à certains agents, pour ajouter à la liste des corps éligibles " les fonctionnaires et stagiaires appartenant au corps des auxiliaires médicaux exerçant en pratique avancée de la fonction publique hospitalière régi par le décret par le décret n°2020-244 du 12 mars 2020   (...)'

 

C'est le décret n°2022-293 du 1er mars 2022 qui porte création effective de la prime spéciale aux personnels relevant du corps des auxiliaires médicaux en pratique avancée , dont le montant est fixé par l'arrêté du 1er mars 2022 à 180 euros mensuels.

 

 

XV Les dernières évolutions légales de la profession : accès direct, primo-prescription de produits et prestations, même soumis à prescription médicale obligatoire

 

  • L’accès direct aux IPA

 

L’article 40 de la loi N °2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 avait précédemment prévu  que l'Etat pouvait autoriser pour une durée de 3 ans et à titre expérimental, des IPA à prendre en charge directement les patients dans le cadre des structures d'exercice coordonné (équipes de soins primaires et spécialisés, communautés professionnelles territoriales de santé, centres de santé et maisons de santé ) Les textes d'application n'ont jamais été pris.

 

La  loi N° 2023-379 du 19 mai 2023 portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé (dite « loi Rist »)  sort du cadre expérimental l’accès direct aux IPA en prévoyant que  dans le cadre des structures d’exercice coordonné précitées sauf les CPTS)ainsi que dans les établissements de santé et les établissements et services sociaux et médico-sociaux, les IPA peuvent pratiquer leur art sans prescription médicale. Un compte rendu des soins réalisés est adressé au médecin traitant et reporté dans le dossier médical partagé. 

 

 

L'accès direct aux IPA exerçant dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé demeure (tout comme les kinésithérapeutes) dans un cadre expérimental :  la loi Rist ouvre cet accès direct  à titre expérimental durant 5 ans et dans 6 départements.Cette évaluation fera l'objet d'une évaluation gouvernementale avant une éventuelle généralisation

 

 

  •  la loi Rist modifie le 1° du I de l'article L. 4301-1 du CSP pour prévoir que les compétences des professionnels en pratique avancée pourront désormais comprendre la primo-prescription de produits de santé et prestations soumis à prescription  médicale obligatoire, dont la liste est fixée par décret.

 

En conséquence, le III de l’article 1erer abroge l'article 76 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, qui prévoyait d'expérimenter, pendant trois ans, la faculté pour les IPA de prescrire certains produits et prestations soumis à prescription médicale. 

  • La création de deux types d’IPA : les IPA spécialisés et les IPA praticiens n'a pas été retenue dans le texte définitif

 

La proposition de loi Rist proposait la création de deux types d’IPA : les IPA spécialisés et les IPA praticiens.

 

Le rapport de la rapporteure de l'Assemblée nationale précisait que les IPA spécialisés auraient eu "vocation à prendre en charge des pathologies complexes dans le cadre d'un domaine de compétence spécifique (...) principalement en établissements de santé" et pourraient intégrer à terme, les spécialités infirmières (infirmièrs anesthésistes, puériculteurs et de bloc opératoire) . Les IPA praticiens ,exerçant "en ville ou l'hôpital'"auraient davantage eu "vocation à agir en amont dans le cadre d'un domaine de compétence plus large et transversal".

 

Selon un rapport publié de l’IGAS publié en novembre 2021, « l’’IPA praticien pourrait avoir pour mission d’intervenir en première ligne sur des pathologies courantes identifiées comme bénignes en soins primaires sur la population générale. »

 

Dans la version modifiée par le Sénat les dispositions introduisant ces 2 types d’IPA ont été supprimées.

 

Au final, ces dispositions n'ont pas été retenues dans le texte de loi définitif.

 

 

 

  • Assouplissement de la réglementation sur l’exercice multi-site : passage d’un régime d’autorisation à un régime déclaratif avec droit d’opposition

 

Par Anne-Cécile LEMOIGNE

 

L’une des mesures du plan gouvernemental d’accès aux soins est le développement de l’exercice multi-site.

 

Dans le cadre du point d’avancement de ce plan effectué en juillet 2018, il était énoncé que ce plan, dans un objectif de « juste présence médicale et soignante dans les territoires », cherchait à lever les rigidités notamment juridiques pour «…favoriser les modes d’exercice mixtes et géographiquement mobiles... ».

 

Le décret n°2019-511 du 23 mai 2019 modifiant le code de déontologie des médecins et la réglementation des sociétés d’exercice libéral et des sociétés civiles professionnelles s'inscrit dans cet objectif.

 

En effet, dans un souci d’allègement des procédures, l’exercice multi-site, que ce soit en mode d’exercice individuel, en SCP ou en SEL, auparavant soumis à un régime d’autorisation ordinale est désormais soumis à un régime de déclaration avec droit d’opposition de l’Ordre.

 

Pour ce faire, le décret modifie l’article R.4127-85 du CSP, l’article R.4113-23 (pour les SEL) et l’article R.4113-74 (propre aux SCP).

 

  1. La réglementation antérieure au décret n°2019-511 du 23 mai 2019

 

Le médecin (la SCP ou la SEL) qui souhaitait exercer sur un site distinct de sa résidence professionnelle habituelle devait solliciter une demande d’ouverture d’un site distinct auprès du conseil départemental de l’ordre dans le ressort duquel se situait l’activité envisagée.

 

Pour être autorisé, le demandeur devait satisfaire à l’un des critères alternatifs suivants ;

 

-soit il existait dans le secteur géographique considéré une carence ou une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la permanence des soins (critère d’ordre démographique) ;

 

-soit les investigations et les soins à entreprendre nécessitaient un environnement adapté, l’utilisation d’équipements particuliers, la mise en œuvre de techniques spécifiques ou la coordination de différents intervenants (critère d’ordre technique)

 

Par ailleurs, le médecin (ou la société) devait" prendre toutes dispositions et en justifier pour que soient assurées sur tous ces sites d’exercice la réponse aux urgences, la qualité, la sécurité et la continuité des soins, "

 

Le conseil de l’ordre étant en droit de demander toutes précisions utiles à ce sujet. et à refuser l’autorisation s’il apparaissait que l’exercice du médecin sur le nouveau site se faisait au détriment de ses obligations déontologiques vis-à-vis des patients qu’il prenait en charge sur un autre site (cf commentaires du CNOM sur la précédente version de l’article R.4127-85 du CSP).

 

Les conditions précitées devaient être également remplies s’agissant de la SCP, qui se voyait appliquer non seulement les dispositions spécifiques de l’article R.4113-74 (exercice en cabinet secondaire exigé pour satisfaire aux besoins des malades et situation des cabinets secondaires et organisation des soins permettant de répondre aux urgences) mais également, celles de l’article R.4127-85 (cf Conseil d’Etat, 4ème et 5ème sous sections réunies,07/07/2010).

 

Le conseil départemental disposait d’un délai de 3 mois pour répondre (délai courant à compter de la réception de la demande ou de la réponse au supplément d’information demandé) étant entendu que le silence gardé à l’expiration de ce délai valait autorisation implicite d’ouverture de site distinct.

 

  1. La nouvelle réglementation issue du décret n°2019-511 du 23 mai 2019

 

Sous l’empire du nouveau décret, la demande d’autorisation de site distinct est remplacée par une déclaration préalable d’ouverture de site distinct qui doit être adressée au plus tard deux mois avant la date prévisionnelle de début d’activité.

 

Les articles R.4127-85, R.4113-23 et R.4113-74 sont modifiés en ce sens.

 

Sont supprimés les deux critères alternatifs précités (critère d’ordre démographique ou critère d’ordre technique) dont le demandeur n'a plus à justifier.

 

Toutefois la déclaration préalable doit être".. accompagnée de toutes informations utiles sur les conditions d'exercice...."

 

Le conseil départemental dans le ressort duquel se situe l’activité envisagée pourra s'y opposer uniquement "... pour des motifs tirés d’une méconnaissance des obligations de qualité, sécurité et continuité des soins et des dispositions législatives et réglementaires. »

 

Cette condition est assez similaire à celle précédemment prévue.

 

Le délai de réponse du conseil départemental de 3 mois antérieurement prévu est remplacé par un délai de 2 mois. Il s’agit du délai dont dispose l'Ordre à compter de la réception de la déclaration pour faire connaître au médecin ou à la société son opposition par une décision motivée. Cette décision est notifiée par tout moyen permettant de donner date certaine à sa réception.

 

Comme auparavant il peut être mis fin à tout moment à la poursuite de l’activité si le conseil départemental constate que  les obligations de qualité, sécurité et continuité des soins ne sont plus respectées.

 

De même, à l'instar de l'autorisation prévue par l'ancienne réglementation, la déclaration est personnelle et incessible.

 

Enfin, comme précédemment, les décisions du conseil départemental peuvent faire l'objet d'un recours hiérarchique devant le conseil national de l'ordre, lequel est un préalable à tout recours contentieux.

 

      3.Entrée en  vigueur du nouveau décret

 

Le nouveau décret entre en vigueur le lendemain de sa publication c'est à dire le 26 mai 2019.

 

L'article 4 du décret prévoit que les demandes d'autorisation d'ouverture d'un site distinct déposées avant cette date restent régies par les dispositions des articles R.4113-23, R.4113-74 et R.4127-85 du CSP dans leur rédaction antérieure.

 

  • Le refus par l'Ordre des médecins de transmettre ou d'introduire une plainte disciplinaire est un acte susceptible de recours pour excès de pouvoir

 

Conformément à l'article R.4126-1 du CSP, l'action disciplinaire contre un médecin (un chirurgien-dentiste ou une sage-femme) ne peut être introduite devant la chambre disciplinaire de première instance que par l'une des personnes ou autorités mentionnées audit article.

 

Parmi ces autorités figurent le conseil national de l'ordre  et le conseil départemental de l'ordre.

 

Le patient ne figure pas parmi les personnes pouvant engager directement  l'action disciplinaire mais peut former une plainte auprès du conseil départemental au tableau duquel le médecin poursuivi est inscrit, qui en tant qu'autorité ordinale pourra engager une action disciplinaire.

 

L'article L.4123-2 prévoit que "Lorsqu'une plainte est portée devant le conseil départemental, son président en accuse réception à l'auteur, en informe le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme mis en cause et les convoque dans un délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte en vue d'une conciliation. En cas d'échec de celle-ci, il transmet la plainte à la chambre disciplinaire de première instance avec l'avis motivé du conseil dans un délai de trois mois à compter de la date d'enregistrement de la plainte, en s'y associant le cas échéant.

 

(...)

 

En cas de carence du conseil départemental, l'auteur de la plainte peut demander au président du conseil national de saisir la chambre disciplinaire de première instance compétente, Le président du conseil national transmet la plainte dans le délai d'un mois."

 

L'engagement de poursuites disciplinaires dépend donc de la décision des autorités ordinales qui est incontestablement un acte faisant grief au patient ce qui le rend susceptible d'un recours pour excès de pouvoir.

 

C'est ce que rappelle un arrêt du Conseil d'Etat du 1er juin 2018 (n°409626).

 

Sur le fondement des articles L.4123-2 et R.4126-1 précités, le Conseil d'Etat considère que :

 

-la décision par laquelle le président du conseil national de l'ordre des médecins, saisi dans les conditions fixées par l'article L.4123-2 du CSP, refuse de transmettre une plainte est susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

 

-la décision par laquelle, à la suite d'une plainte dont il est saisi, le conseil national ou le conseil départemental de l'ordre au tableau duquel le praticien est inscrit refuserait d'introduire une plainte devant la chambre disciplinaire compétente est également susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

 

  • Les juridictions disciplinaires de l'ordre des médecins peuvent fonder une sanction sur des griefs nouveaux non invoqués dans la plainte à condition que les droits de la défense soient respectés mais n'ont pas, par contre, l'obligation de communiquer préalablement aux parties le choix de la qualification juridique des griefs

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Dans un arrêt rendu le 24 octobre 2018 (n° 404660), le Conseil d'Etat rappelle le principe qu'il avait déjà énoncé précédemment selon lequel "(...) les juridictions disciplinaires de l'ordre des médecins saisies d'une plainte contre un praticien, peuvent légalement connaître de l'ensemble du comportement professionnel de l'intéressé sans se limiter aux faits dénoncés dans la plainte ni aux griefs articulés par le plaignant.

 

A ce titre la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins peut légalement se fonder , pour infliger une sanction à un médecin, sur des griefs nouveaux qui n'ont pas été dénoncés dans la plainte soumise à la chambre disciplinaire de première instance, à condition toutefois d'avoir mis au préalable l'intéressé à même de s'expliquer sur ces griefs (...)

 

Le Conseil d'Etat énonce également un second principe selon lequel la chambre disciplinaire nationale "....n'est en revanche pas tenue de communiquer préalablement aux parties le choix, qui lui incombe, de la qualification juridique des griefs au regard des dispositions du code de déontologie médicale(...)".

 

 

1.  Sur la prise en considération de griefs nouveaux non mentionnés dans la plainte disciplinaire s'ils ont pu être discutés par le médecin intéressé

 

Dans cette affaire, un chirurgien-orthopédiste a refusé au dernier moment de pratiquer une intervention programmée sur une patiente âgée de 82 ans, alors qu'il avait non seulement confirmé la tenue de cette intervention auprès de sa patiente et fait venir un confrère anesthésiste-réanimateur en laissant procéder à une anesthésie générale mais aussi, sachant par avance qu'il ne pourrait disposer d'une aide opératoire pour cette opération, convoqué un huissier afin que celui-ci constate que cette absence d'aide opératoire l'empêchait de travailler dans des conditions satisfaisantes.

 

La clinique a porté plainte au disciplinaire. La chambre disciplinaire de première instance a infligé une sanction d'interdiction d'exercice de la médecine de 6 mois dont 3 mois avec sursis

 

La chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins, saisie en appel de la décision d'interdiction d'exercice a retenu le grief invoqué dans la plainte, et retenu par les premiers juges,"  tiré de ce qu'il n'avait, en mettant ainsi en danger sa patiente, prévenu personne de son intention d'annuler l'opération programmée en cas d'absence, pourtant anticipée par lui d'une aide opératoire...."

 

Cependant, la chambre disciplinaire nationale a également retenu un nouveau grief (qui n'avait pas été évoqué dans la plainte déposée par la clinique) tiré de la faute disciplinaire de manquement à la confraternité commise, le jour de l'opération chirurgicale, par le chirurgien à l'égard de son confrère anesthésiste-réanimateur en ne l'informant pas de son intention de ne pas procéder à l'opération.

 

Ce grief qui ne figurait pas dans la plainte initiale a été relevé par la clinique plaignante dans son mémoire en réplique devant la juridiction de première instance  et dans son mémoire en défense devant le juge d'appel, mémoires qui ont été communiqués dans le cadre de l'instruction au médecin incriminé.

 

 Celui ci ayant été par conséquent à même de  s''expliquer sur ledit grief, il n'est pas fondé à soutenir qu'en ne procédant pas elle-même à la communication préalable de ce grief, la chambre disciplinaire nationale (juridiction d'appel) aurait entaché sa décision d'irrégularité.

 

Ce principe selon lequel la chambre disciplinaire nationale peut légalement se fonder, pour infliger une sanction à un praticien, sur des griefs nouveaux qui n'ont pas été dénoncés dans la plainte soumise à la chambre disciplinaire de première instance à condition d'avoir mis au préalable les intéressés à même de s'expliquer sur ces griefs dans le cadre de la procédure a déjà été énoncé par le Conseil d'Etat.

 

Un arrêt analogue en date du 15 décembre 2010 (n°329246) a été ainsi rendu par le Conseil d'Etat '(s'agissant d'un médecin) et un autre arrêt du Conseil d'Etat du 10 juillet 2017 (n°385419) posant le même principe a été rendu concernant un chirurgien-dentiste.

 

 

Sur l'absence d'obligation de communication préalable aux parties du choix de la qualification juridique des griefs au regard des dispositions du code de déontologie médicale

 

Dans son arrêt du 24 octobre 2018, le Conseil d'Etat pose également le principe selon lequel la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins n'est pas tenue de communiquer préalablement aux parties le choix, qui lui incombe, de la qualification juridique des griefs au regard des dispositions du code de déontologie médicale

 

En effet, la chambre disciplinaire nationale(juridiction d'appel), pour infliger la sanction d'interdiction d'exercice, a notamment retenu que le grief tiré de son attitude à l'égard de la patiente âgée pouvait être juridiquement qualifié, ainsi que 'l'avaient fait les premiers juges, d'atteinte à la dignité de la patiente en violation de l'article R.4127-2 du CSP et de  mise en danger injustifiée en méconnaissance de l'article R4127-40 du même code..

 

Cependant la chambre disciplinaire nationale a retenu en sus une 3ème qualification juridique   concernant ce comportement à l'égard de la patiente, qualification qui n'avait pas été retenue par les premiers juges, à savoir un manquement à l'obligation d'information loyale de cette patiente en méconnaissance des dispositions de l'article R.4127-35 du CSP.

 

Le médecin soutenait que la chambre disciplinaire nationale devait l'inviter à présenter préalablement sa défense sur cette nouvelle qualification juridique.

 

Le Conseil d'Etat considère que dès lors que médecin a pu utilement présenter sa défense concernant le grief lié à l'attitude adoptée à l'égard de la patiente, la chambre disciplinaire nationale a pu, sans irrégularité, le retenir comme fondement de la sanction prononcée, non seulement en le qualifiant d'atteinte à la dignité et de mise en danger injustifié (qui était la qualification également énoncée par les premiers juges) mais également en retenant une nouvelle qualification de manquement à l'obligation d'information loyale de la patiente.

 

Au delà des deux principes énoncés par le Conseil d'Etat, que nous venons d'évoquer, qui intéressent la procédure disciplinaire, cet arrêt exprime et illustre parfaitement le principe selon lequel l'instrumentalisation d'un patient, à savoir l'utilisation d'un patient pour servir ses intérêts personnels (en l'espèce pour dénoncer un problème organisationnel de carence de personnel d'assistance opératoire dont le praticienl s'estime victime) est proprement anti-déontologique et doit être disciplinairement sanctionné.

 

Sur ce point, le Conseil d'Etat a considéré, qu' eu égard à la gravité des comportements reprochés (tant à l'égard de la patiente que des personnels) la chambre disciplinaire nationale, en confirmant la sanction d'interdiction d'exercer la médecine, dont 3 mois avec sursis, prononcée par la chambre disciplinaire de 1ère instance, n'a pas retenu une sanction hors de proportion avec les fautes commises.

 

  • La responsabilité professionnelle au titre des soins donnés dans le cadre de l'exercice au sein d'une SCP demeure malgré la cession par l'associé de ses parts sociales

 

Dans un arrêt rendu le 11 juillet 2018 (n°17-17.441 17-19581), la Cour de cassation évoque utilement le principe selon lequel la perte de la qualité d'associé de SCP ne fait pas disparaître la responsabilité professionnelle d'un masseur-kinésithérapeute pour les soins qu'il a prodigués antérieurement.

 

Dans cette affaire, le masseur-kinésithérapeute, associé d'une SCP qui avait commis une faute professionnelle à l'égard d'un patient avait sollicité une expertise en référé mais était décédé avant sa réalisation

 

Ses héritiers, contre lesquels l'action en responsabilité a été poursuivie, ont cédé les parts sociales détenues dans la SCP à un coassocié et demandé à être mis hors de cause puisqu'ils avaient perdu la qualité d'associé à compter de la cession des parts.

 

La Cour d'appel de Montpellier fait droit à leur demande

 

La Cour de cassation casse l'arrêt.

 

La Haute juridiction judiciaire se fonde sur :

 

-les dispositions de l'article 16 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles qui dispose notamment que "Chaque associé répond sur l'ensemble de son patrimoine, des actes professionnels qu'il accomplit." et que "La société est solidairement responsable avec lui des conséquences dommageables de ces actes."

 

-l' article R4381-25, applicable aux SCP de masseurs kinésithérapeutes (ou d'infirmiers), qui prévoit au 3ème alinéa que ".. La responsabilité de chaque associé à l'égard de la personne qui se confie à lui demeure personnelle et entière, sans préjudice de l'application de l'article 16 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles."

 

Elle en déduit que "(...) la cession par un associé de ses parts sociales est dépourvue d'effet sur sa responsabilité qui demeure, comme celle de la société, engagée au titre des conséquences dommageables des soins qu'il a prodigués dans le cadre de son exercice au sein de la société  (...)".

 

Nonobstant l'exercice en société, la responsabilité du masseur-kinésithéapeute reste personnelle.

 

Cette solution est transposable s'agissant des médecins exerçant en SCP ou en SEL puisqu'ils sont soumis aux mêmes dispsitions législatives ou ou à des dispositions législatives comparables (les mêmes pour les SCP de médecins et l'article 16 de la loi  n° 90-1258 du 31 décembre 1990  pour les SEL de médecins) et à l'article R.4127-69 du CSP qui prévoit que "L'exercice de la médecine est personnel ; chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes."

 

  • Caractérisation et sanction du défaut d'exécution d'une décision d'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

L'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux, prévue par l'article L.145-2 du Code de la sécurité sociale, est l'une des sanctions susceptibles d'être prononcées par la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance ou par la section spéciale des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins ou des chirurgiens-dentistes ou des sages-femmes.

 

La décision d'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux, lorsqu'elle est devenue définitive, a force exécutoire.

 

Dans un arrêt du 13 avril 2018 (n°391895), le Conseil d'Etat précise les agissements qui caractérisent la non exécution d'une décision d'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux.

 

Il est mentionné dans cet arrêt que la sanction d'interdiction temporaire ou permanente, avec ou sans sursis, du droit de donner des soins aux assurés sociaux "(...) fait obligation au praticien concerné de s'abstenir de donner des soins aux assurés sociaux, même à titre gratuit; qu'elle fait également obstacle à ce que le praticien se fasse remplacer dans son exercice pour donner de tels soins, même s'il ne tire aucune contrepartie financière de ce remplacement. (...)".

 

Même dans ce dernier cas en effet, le non respect de l'interdiction constitue une faute déontologique susceptible d'être sanctionnée notamment par une interdiction d'exercice, comme ce fut le cas en l'espèce.

 

Cet arrêt fait écho à deux autres arrêts rendus par le Conseil d'Etat, l'un le 30 juin 1993 (n°90559), l'autre le 18 décembre 2009 (n°333873).

 

Dans le premier arrêt, le Conseil d'Etat a considéré que "(...) en jugeant que la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant  deux mois faisait obstacle à ce que M.X ..se fasse remplacer dans son cabinet, au cours de cette période, par des confrères qui lui reversaient une partie des honoraires perçus, alors même que ce reversement aurait éventuellement correspondu aux frais de gestion des installations techniques de M.X.., la section des assurances sociales n' a pas commis d'erreur de droit (...)".

 

Peut importe donc, pour caractériser le défaut d'exécution de la décision d'interdiction, qu'il y ait ou non enrichissement du praticien.

 

Dans le second arrêt, un chirurgien-dentiste, qui s'était vue infliger une sanction d'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pendant une période de quatre mois, dont deux mois avec sursis, a signé ans le but d'organiser son remplacement pendant ces deux, au nom de la SELARL  un contrat de remplacement libéral avec un praticien et transmis ce contrat au président du conseil départemental du Conseil de l'ordre des chirurgiens-dentistes de l'Hérault.

 

Le Président de ce conseil départemental a informé le praticien de ce qu'il était interdit de se faire remplacer pendant les périodes de sanction d'interdiction de donner des soins et de prendre un collaborateur et a déclaré nul et non avenu le contrat qui lui avait été transmis .

 

Le chirurgien-dentiste a alors saisi, dans le cadre de la procédure de référé-liberté, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier d'une demande tendant à ce qu'elle soit autorisée à organiser son remplacement pendant la période d'exécution de la sanction, demande qui a été rejetée.

 

Le praticien a alors formé un pourvoi devant le Conseil d'Etat aux fins d''annulation de l'ordonnance du  juge des référés du tribunal administratif et afin que la haute juridiction administrative, statuant comme juge des référés, ordonne qu'elle puisse recourir à un remplaçant durant la période d'interdiction de donner des soins.

 

Le Conseil d'Etat rappelle en premier lieu  que l''article R. 4113-17 du code de la santé publique :prévoit que"  En cas d'interdiction temporaire d'exercer ou de dispenser des soins aux assurés sociaux, sauf à être exclu par les autres associés (d'une société d'exercice libéral) ..., l'intéressé conserve ses droits et obligations d'associé, à l'exclusion de la rémunération liée à l'exercice de son activité professionnelle .

 

Puis le Conseil d'Etat énonce que "(...) qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le contrat conclu entre la SELARL A et M. (...) prévoyait le versement de tous les honoraires perçus pendant la période de remplacement correspondant à l'interdiction d'exercer de Mme A à la SELARL et la rémunération de M. sous forme de vacation en pourcentage des honoraires encaissés ; que ce contrat aurait eu pour effet de permettre à Mme A, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 4113-17 du code de la santé publique, de percevoir une rémunération liée à l'exercice de sa profession alors qu'elle était sous le coup d'une interdiction d'exercer ; qu'en relevant que la suspension temporaire de l'activité professionnelle prononcée à titre de sanction à l'encontre de Mme A impliquait que celle-ci s'abstienne durant la période de suspension de percevoir des revenus tirés de son activité et non pas seulement qu'elle s'abstienne de pratiquer des actes de sa propre main et en estimant que le refus d'approuver le contrat organisant le remplacement de Mme A opposé par le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes de l'Hérault n'était, par suite, entaché d'aucune illégalité pour en déduire qu'aucune urgence ne s'attachait à l'organisation du remplacement de la praticienne, le juge des référés n'a ni insuffisamment motivé son ordonnance, ni commis d'erreur de droit (...)'.

 

L'interdiction de se faire remplacer (ou de prendre un collaborateur) pendant la période d'interdiction s'applique au praticien même si le contrat de remplacement est conclu par l'intermédiaire de la SELARL dont il est membre.

 

  • Du contrôle exercé par le Conseil d'Etat sur la proportionnalité de la sanction prononcée par une juridiction ordinale avec la faute commise 

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Les juridictions ordinales, juridictions administratives spécialisées, peuvent inflger des sanctions disciplinaires aux médecins qui se rendent coupables de manquements déontologiques.

 

Depuis un arrêt  du  30 décembre 2014 (n°381245), le Conseil d'Etat considère que "...si le choix de la sanction relève de l'appréciation des juges du fond au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction  retenue n'est pas hors de proportion avec la faute commise et qu'elle a pu dès lors être légalement prise...."

 

En d'autres termes, si  les juridictions ordinales ont un pouvoir souverain d'appréciation de la sanction disciplinaire au regard des faits, le Conseil d'Etat, juge de cassation, opère un  contrôle de proportionnalité de la dite sanction en fonction de la gravité de la faute commise.

 

Deux arrêts récents peuvent venir illustrer la mise en oeuvre par le Conseil d'Etat de ce contrôle de proportionnalité.

 

Un arrêt du Conseil d'Etat du 21 janvier 2015 (n°370069) 

 

Dans  cette affaire, un médecin avait commis de graves fautes dans l'exercice de ses fonctions de trésorier d'un Conseil départemental de l'ordre des médecins

 

Des avances avaient été consenties pendant plusieurs années sur indemnités ou remboursement de frais au président du CDOM. Le médecin trésorier avait également admis que deux chèques d'un montant significatif lui soient remis à des fins personnelles en informant tardivement les autres membres du bureau et sans prendre de mesures efficaces pour mettre fin à ces dérives.L'intéressé s'est abstenu de révéler ces agissements à une délégation du conseil national venue au CDOM.

 

La chambre disciplinaire nationale a estimé que le médecin avait fait preuve de légereté et d'imprudence dans l'exercice de ses fonctions et ainsi contrevenu aux dispositions de l'article R.4127-3 relative à l'obligation de probité et de moralité et aux dispositions de l'article R.4127-31 sur l'atteinte à l'honneur de la profession.

.

Après avoir rappelé le principe du contrôle de proportionnalité  de la sanction par le juge de cassation ( principe énoncé par le CE dans l'arrêt du 30 décembre 2014 précédemment évoqué) le CE considère qu'en infligeant au médecin la sanction d'interdiction d'exercer pendant un an, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins n'a pas retenu une sanction hors de proportion avec la faute constituée par des manquements graves et répétés dans l'exercice des fonctions de trésorier du CDOM et que la sanction a pu dès lors  être légalement prise.

 

 

Un arrêt du Conseil d'Etat du 24 novembre 2017 (n°401564) 

 

La chambre disciplinaire de première instance de Midi-Pyrénées avait infligé début 2015 à un médecin généraliste la sanction de radiation du tableau de l'ordre des médecins au motif qu'il avait pratiqué la médecine au cours de la période du 1er février au 5 juillet 2012, en méconnaissance de l'interdiction d'exercice prononcée à son encontre en 2011 par  une décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins 

 

Le médecin s'est pourvu en cassation contre la décision  de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre rendue en 2016 qui avait rejeté son appel formé contre la décision de radiation prononcée à son encontre par la chambre disciplinaire de 1ère instance.

 

En premier lieu, sur le principe de la faute disciplinaire, le Conseil d'Etat a considéré que la chambre disciplinaire nationale de l'ordre avait suffisamment motivé sa décision confirmative.et qu'elle avait pu estimer sans dénaturer les faits dans le cadre de son appréciation souveraine, au vu des pièces et témoignages fournis, que le  médecin avait effectué de nombreuses prescriptions au cours de la période pendant laquelle il devait exécuter la sanction disciplinaire d' interdiction d'exercice.

 

En second lieu, opérant son contrôle de proportionnalité de la sanction de radiation du tableau, le Conseil d'Etat a considéré que "...eu égard à la gravité de la faute consistant à poursuivre sciemment l'exercice d'une activité médicale pendant une période couverte par une interdiction d'exercice, la chambre disciplinaire de l'ordre des médecins n'a pas, en confirmant la sanction de radiation du tableau de l'ordre des médecins, retenu une sanction hors de proportion avec la faute reprochée...".

 

  • La profession de physicien médical est reconnue par ordonnance (article mis à jour le 15 mars 2018) 

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Le IV de l'article 216 de la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi permettant de reconnaître la profession de "physicien médical" comme profession de santé.

 

En application de cet article, l'ordonnance n°2017-48 du 19 janvier 2017 relative à la profession de physicien médical crée au livre II, désormais intitulé " Professions de la pharmacie et de la physique médicale ", un titre V dénommé " profession de physicien médical " composé des articles L.4251-1 à L.4252-3 du CSP.

 

Elle rejoint l'action 4.2. du Plan cancer 2014-2019 qui consiste à reconnaître pleinement la profession de radiophysicien en tant que profession de santé.

 

Le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance précise que "Les mots " physicien médical " ont été préférés à  radiophysicien " car c'est ainsi que cette profession est dénommée dans la directive 2013/59/Euratom du 5 décembre 2013 fixant les normes de base en radioprotection.".

 

Ce rapport mentionne également que "...la reconnaissance du métier de radiophysicien en tant que profession de santé contribue à favoriser la qualité et la sécurité des soins, par une meilleure définition de son rôle et de ses missions...".

 

L'article L.4251-1 du CSP définit l'exercice de la profession de physicien médical en ces termes :

 

"Le physicien médical exerce au sein d'une équipe pluri-professionnelle.

 

Il apporte son expertise pour toute question relative à la physique des rayonnements ou de tout autre agent physique dans les applications médicales relevant de son champ d'intervention.

 

Il est chargé de la qualité d'image, de la dosimétrie et de l'exposition aux autres agents physiques.

 

Il s'assure notamment que les équipements, les données et procédés de calcul utilisés pour déterminer et délivrer les doses et les activités des substances radioactives administrées au patient sont appropriés et permettent de concourir à une optimisation de l'exposition aux rayonnements ionisants.

(...)"

 

L'article précité renvoie à un décret en CE, qui doit être pris après avis de l'Académie nationale de médecine, le soin de définir "...les missions et les conditions d'intervention du physicien médical, en radiothérapie, en médecine nucléaire et en imagerie médicale, notamment les actes réalisés sur prescription médicale,(...)".

 

N'est toujours pas publié à ce jour le décret d'application de l'article L.4251-1 précité issu de l'ordonnance.

 

Il apparaît ainsi que si le cadre général des missions du physicien médical  est défini par l'ordonnance, le contenu n'a toujours pas été réglementairement précisé.

 

L'article L.4251-2 définit les conditions de diplômes requis pour exercer la profession de physicien médical et  user du titre et prévoit une dérogation pour les titulaires d'un agrément de radiophysicien avant 28 novembre 2004.

 

L'ordonnance introduit par ailleurs une procédure de reconnaissance des qualifications professionnelles des ressortissants européens pour les physiciens médicaux, dans le cadre de la transposition de la directive 2013/ 55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005./36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (...) 

 

Les articles L.4251-5 à L.4251-7 prévoient les différentes autorisations individuelles d'exercice et la déclaration de prestation de service pour les ressortissants européens.

 

Un décret n°2017-1520 du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé   ainsi que deux arrêtés du 8 décembre 2017 sont venus fixer ces procédures(arrêté du 8 décembre 2017 sur la déclaration préalable de prestation de service;  arrêté du 8 décembre 2017 relatif aux niveaux de qualification pris en compte pour la détermination des mesures de compensation pour la reconnaissance des qualifications des professions de santé)

 

Les articles L.4251-3 et L.4251-4 traitent des conditions d'enregistrement des diplômes.

 

Les articles L4252-1 et L.4252-2 sont relatifs à l'exercice illégal de la profession. Se rendent ainsi coupables d'une telle infraction les personnes exerçant la profession sans être titulaires du diplôme de qualification en physique radiologique et médicale ou du diplôme de physicien médical ou des titres prévus à l'article L.4151-5 pour la délivrance d'une autorisation indivduelle d'exercice en tant que ressortissant européen/CEtte infraction est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30000 euros d'amende.

 

Le délit d'usurpation de titre est également pénalement sanctionné.(article L.4252-3)

 

L'ordonnance (art 3) prévoit enfin que les personnes exerçant la profession de radiophysicien à la date d'entrée en vigueur du décret d'application prévu à l'article L.4251-8 disposent d'un délai de 6 mois à compter de cette date pour s'enregistrer.

 

Est récemment parue au JO la loi ratifiant sans modification l'ordonnance (ce qui lui confère valeur de loi) (cf Loi n°2018-132 du 26 février 2018) 

 

En revanche le décret prévu à l'article L.4151-8 visant à définir en tant que besoin les modalités d'exercice et les règles professionnelles applicables au physicien médical n'est toujours pas paru.

 

Il en est de même, comme nous l'avons indiqué ci-avant, du contenu des missions et des conditions d'intervention du physicien médical selon le domaine d'intervention (radiologie interventionnelle, radiothérapie, imagerie médicale) en ce compris les actes pouvant être accomplis sur prescription médicale.

 

 

Limitation des dépassements d'honoraires : le contrat d'accès aux soins est remplacé  par deux options pratiques tarifaires maîtrisées

 

Par anne-cécile Lemoigne

 

Vient d'être publiée au JO la nouvelle convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l'Assurance maladie conclue le 25 août dernier entre l'UNCAM et trois syndicats de médecins.(La Fédération Française des Médecins Généralistes La Fédération des Médecins de France, Le Bloc).

 

Entre autres mesures, le dispositif du contrat d'accès aux soins (CAS), qui avait été institué par l'avenant n°8 à la précédente convention médicale, est remplacé par deux options conventionnelles :

 

-une option pratique tarifaire maîtrisée (OPTAM), applicable à l’ensemble des médecins (articles 40 et suivants de la convention, annexe 18) ;

 

-une option pratique tarifaire maîtrisée chirurgie et obstétrique (OPTAM-CO), applicable aux médecins exerçant une spécialité de chirurgie ou une spécialité de gynécologie-obstétrique (articles 49 et suivants de la convention, annexe 20)

 

Tout en s'inscrivant dans la dynamique de modération des dépassements d'honoraires engagée avec le CAS, ces nouvelles options conventionnelles, ont pour ambition d'être plus attractives auprès des médecins.

 

Comme pour le CAS, peuvent adhérer aux options OPTAM et  OPTAM-CO:

 

- les médecins autorisés à pratiquer des honoraires différents

 

-les médecins titulaires des titres permettant d’accéder au secteur à honoraires différents et qui s’installent pour la première fois en exercice libéral en secteur à honoraires différents,

 

- les médecins titulaires du droit à dépassement permanent.

 

Par dérogation, les médecins titulaires des titres permettant d'accéder au secteur à honoraires différents et installés antérieurement au 1er janvier 2013 en secteur à honoraires opposables peuvent adhérer à l’option pratique tarifaire maîtrisée.

 

Le médecin s'engage sur deux indicateurs:

 

-le respect d'un taux de dépassement moyen qui ne peut excéder 100%

 

-le respect d'un taux d'activité à tarif opposable (qui inclut les situations d’urgence médicale, patients en CMUC ou disposant de l’attestation de droit à l’ACS) qui ne peut être inférieur à 30 %

 

La période de référence correspond aux trois dernières années d'exercice précédant l'entrée en vigueur de la convention

 

Les avantages dont bénéficie le praticien qui souscrit ne sont pas les mêmes que pour le CAS.

 

Les médecins adhérant au CAS bénéficiaient d'un financement partiel de leurs cotisations sociales par l'assurance maladie sur la part des honoraires réalisés au tarif opposable.

 

outre l'alignement des tarifs opposables sur les médecins exerçant à honoraires opposables, les médecins adhérant à l'option OPTAM bénéficient désormais, d'une rémunération spécifique  afin de valoriser l’activité à tarif opposable qu'ils réalisent à condition d'avoir respecté les engagements attachés à l' option souscrite.

 

Cette rémunération est calculée de la manière suivante : Est appliqué un taux sur les honoraires réalisés à tarifs opposables correspondant au taux de cotisations moyen sur les trois risques, maladie maternité décès, allocations familiales et allocation supplémentaire vieillesse. Ce taux varie en fonction de chaque spécialité, tel que défini à l’annexe 19 de la convention. Le montant résultant de l’application de ces taux sur le montant total des honoraires à tarifs opposables réalisé annuellement (année N) par le médecin est versé chaque année au médecin au moment de la vérification du respect de ses engagements contractuels (en juillet de l’année N+1).

 

Pour les adhérents à l'option OPTAM-co, l'assurance maladie s'engage à ce que le niveau de la majoration forfaits modulables (modificateur K) applicable aux actes de chirurgie et aux actes d’accouchements définie dans la liste des actes et prestations mentionnée à l’article 162-1-7 du code de la sécurité sociale soit porté à 20% pour les médecins exerçant dans le secteur à honoraires opposables et pour les adhérents à l’option OPTAM-CO.

 

Les modalités de résiliation sont assouplies

 

Dans le cadre du dispositif du CAS, l'adhésion au contrat était valable pour une durée de 3 ans mais le médecin ayant adhéré  pouvait revenir sur ce choix à la date anniversaire du contrat ou, si un avenant avait été conclu à la date anniversaire de celui-ci.

 

La  nouvelle option  est conclue pour une durée d’un an à compter de sa signature, renouvelable par tacite reconduction et l'adhésion à l'option est résiliable à tout moment

 

Les nouvelles options conventionnelles entreront en vigueur le 1er janvier 2017.

 

Radiologie : le manipulateur n'est plus légalement placé sous la surveillance d'un médecin en mesure de contrôler l'exécution des actes et d'intervenir immédiatement (article mis à jour le 6 décembre 2016)

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

La loi du 26 janvier 2016 portant réforme de notre système de santé a modifié les règles liées à l'exercice de la profession et à l'exercice illégal de plusieurs paramédicaux, dont les manipulateurs d'électroradiologie médicale.

 

L'article L.4351-1 du CSP dans son ancienne version, prévoyait que devait être « (…) considérée comme exerçant la profession de manipulateur d'électroradiologie médicale toute personne qui, non médecin, exécute habituellement, sous la responsabilité et la surveillance d'un médecin en mesure d'en contrôler l'exécution et d'intervenir immédiatement, des actes professionnels d'électroradiologie médicale définis par décret en Conseil d’État pris avis de l'Académie nationale de médecine .Les manipulateurs d'électroradiologie médicale exercent leur art sur prescription médicale (...) ».

 

Le placement « ...sous la surveillance d'un médecin en mesure d'en contrôler l'exécution et d'intervenir immédiatement... » était également évoqué dans l'ancien article R.4351-2 du CSP.

 

Il résulte des dispositions précitées que sous l'empire de l'ancienne législation, le manipulateur exerçait les actes d'électroradiologie médicale sous la responsabilité et la surveillance d'un médecin, pas nécessairement radiologue puisque dans le cas contraire, cela serait aurait été précisé.

 

Ce médecin devait être en mesure d'intervenir immédiatement, ce qui présupposait sa présence in situ sans qu'il fût obligatoirement physiquement avec le manipulateur.

 

Le nouvel article L.4351-1 du CSP, issu de l'article 208 de la loi portant réforme de notre système de santé, prévoit désormais que « Est considérée comme exerçant la profession de manipulateur d'électroradiologie médicale toute personne, non médecin, qui exécute sur prescription médicale et sous la responsabilité d'un médecin, des actes professionnels d'électroradiologie médicale. ».

 

Comme on peut le constater, la surveillance d'un médecin en mesure de contrôler l'exécution des actes effectués et d'intervenir immédiatement n'est plus mentionnée dans l'article de loi.

 

En revanche, il est précisé dans cet article que «Le cas échéant, le manipulateur d'électroradiologie médicale intervient sous l'autorité technique d'un radiophysicien pour les activités de physique médicale mises en œuvre au cours de la préparation ou de la réalisation des actes exposant aux rayonnements ionisants.(...) »

 

Il est par ailleurs indiqué que « Le manipulateur d'électroradiologie médicale peut également ,dans le cadre prévu à l'article L. 5126-5 et sous l'autorité technique d'un pharmacien, aider à réaliser les actes définis par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Académie nationale de pharmacie. »

 

Le décret n°2016-1672 du 5 décembre 2016 est venu définir , en application de l'article L4351-1 précité, les actes et activités pouvant être réalisés par les manipulateurs d'électroradiologie médicale.

 

Il est important de relever que l'article R.4351-1 du CSP issu de ce décret précise notamment que le manipulateur d'électroradiologie médicale "...intervient dans les domaines de l'imagerie médicale, de la médecine nucléaire , de la radiothérapie et des explorations fonctionnelles, sur prescription médicale et sous la responsabilité d'un médecin de la spécialité concernée".

 

Le médecin responsable est ainsi toujours de la spécialité dont relève l'acte effectué.

 

Par ailleurs, le décret énumère, dans chacun des domaines précités à l'article R.4351-1, les actes et activités qu'il est habilité à réaliser ou auxquels il peut participer :

 

-les actes et activités que le manipulateur est habilité à réaliser, sous la responsabilité du médecin de la spécialité concernée, en application soit d'une prescription médicale individuelle, soit d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin (R4351-2-1).

 

- les actes et activités que le manipulateur est habilité à pratiquer,  sous la responsabilité du médecin de la spécialité concernée, en application soit d'une prescription médicale individuelle, soit d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin, à condition qu'un médecin, et le cas échéant, un physicien médical, dans le champ qui le concerne, puissent intervenir à tout moment (R4351-2-2)

 

-les actes et activités à la réalisation desquels  le manipulateur est habilité à participer , sous la responsabilité et en présence du médecin de la spécialité concernée, et le cas échéant, d'un physicien médical, dans le champ qui le concerne, en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé.(R.4351-2-3)

 

-les activités que le manipulateur est habilité à accomplir, sous la responsabilité du médecin de la spécialité concernée, dans le cadre des actes et activités  évoqués ci-dessus 

 

-lorsqu'il exerce dans le cadre d'une PUI, les actes et activités qu'il est habilité à aider à réaliser sous l'autorité technique d'un pharmacien.

 

Il résulte de ce qui précède que les actes énumérés correspondent à trois degrés d'autonomie :

 

-les actes réalisés sans nécessité de la présence d'un médecin mais sous la responsabilité du  médecin de la spécialité concernée

 

-les actes réalisés sous la responsabilité du médecin de la spécialité concernée et nécessitant qu'un médecin ,et le cas échéant, un physicien médical, dans le champ qui le concerne, puissent intervenir à tout moment;

 

-la participation à des actes  sous la responsabilité et en présence du médecin de la spécialité concernée(et le cas échéant, d'un physicien médical, dans le champ qui le concerne)

 

Il convient également de signaler que le manipulateur d'électroradiologie médicale pourra désormais, en application de l'article R.4351-2-2 précité, recueillir le signal et les images en échographie, sous réserve de l'obtention d'un titre ou d'un diplôme dont la liste est fixée par arrêté ministériel et à condition qu'un médecin puisse intervenir à tout moment.

 

Comme il est indiqué dans le projet de loi, ces évolutions légales et réglementaires contribuent à « la modernisation de la profession de manipulateur d'électroradiologie médicale ».

 

Plus d'autonomie leur est reconnue vis-à-vis du médecin, même s'ils demeurent néanmoins toujours placés sous la responsabilité de ce dernier et doivent en référer à celui-ci en cas de problème ou de demande de précision et sont placés sous l'autorité technique du radiophysicien pour les activités de physique médicale mises en œuvre au cours de la préparation ou de la réalisation des actes exposant aux rayonnements ionisants

 

La modernisation de la profession évoquée ci-avant ne concerne pas seulement l'exercice effectif de la profession mais se concrétise également dans la réingéniérie du diplôme requis pour exercer la profession de manipulateur. Un décret du 14 janvier 2016 attribue en effet, à l'instar des infirmiers, le grade de licence aux titulaires du diplôme de technicien supérieur en imagerie médicale et radiologie thérapeutique et aux titulaires du DE de manipulateur d'électroradiologie médicale.

 

  • Validation par le Conseil d'Etat du dispositif conventionnel de contrôle et de sanction des dépassements d'honoraires excessifs

 

Par anne-Cécile Lemoigne

 

Par un arrêt du 4 novembre 2015, le Conseil d'Etat rejette un recours formé contre l'arrêté approuvant l'avenant n°8 à la convention médicale portant sur le dispositif de régulation des dépassements d'honoraires excessifs des médecins libéraux.

 

L'avenant n°8 (articles 3 et 11) a en effet instauré une procédure de sanction spécifique applicable en cas de pratique tarifaire excessive d'un médecin exerçant en secteur à honoraires différents ou titulaire du droit à dépassement permanent.

 

Il s'agit d'une sanction conventionnelle à distinguer des sanctions disciplinaires éventuellement prononcées par les juridictions ordinales pour violation de l'article R4127-53 relatif à l'obligation de tact et mesure dans la détermination des honoraires.

 

Cette sanction conventionnelle peut être prononcée par le directeur de la CPAM en cas d'absence de modification de la pratique tarifaire à l'issue d'un délai de 2 mois à compter de la réception d'un avertissement et après examen par une commission paritaire régionale.

 

L'article 3 de l'avenant litigieux prévoit que le caractère excessif de la pratique tarifaire s'apprécie au regard de tout ou partie de quatre critères qui sont le taux de dépassement, le taux de croissance annuel de ce taux, la fréquence des actes avec dépassement et la variabilité des honoraires pratiqués, enfin, le dépassement annuel moyen par patient. L'article 3 prévoit que l'appréciation tient également compte de la fréquence des actes par patient, du volume global d'activité du professionnel, du lieu d'implantation du cabinet, de la spécialité pratiquée et des niveaux d'expertise et de compétence du praticien.

 

Le préambule de l'avenant mentionne qu'un" taux de dépassement à 150 % du tarif opposable (donc 2, 5 fois le tarif opposable) pourra servir de repère" mais que ce taux "...pourra faire l'objet d'adaptations dans certaines zones géographiques limitées et aura vocation à se modérer en cours de convention. "

 

C'est le directeur général de l'UNCAM qui définit les "principes de sélection des médecins susceptibles de relever de la procédure de sanction applicable aux pratiques tarifaires excessives ", après avis de la commission paritaire nationale (Ces principes de sélection ont été définis début 2013. Nous vous invitons à vous y reporter)

 

Le Conseil d'Etat considère que les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'avenant méconnaîtrait les principes constitutionnels d'indépendance et d'impartialité au motif qu'il confie aux CPAM des fonctions de poursuite, d'instruction et de sanction.

 

Il est également considéré que les stipulations relatives à la procédure préalable à la sanction garantissent le respect des droits de la défense et le droit du médecin d'être assisté d'un avocat

 

Le Conseil d'Etat estime par ailleurs que l'avenant litigieux ne méconnaît pas le principe de légalité des délits et des peines en relevant que :

 

-les principes de sélection des médecins susceptibles de relever de la procédure de sanction "...n'ont ni pour objet ni pour effet de définir les manquements susceptibles de sanctions mais doivent être regardés comme des lignes directrices destinées à harmoniser la pratique des caisses primaires d'assurance maladie"

 

-les sanctions susceptibles d'être prononcées "sont définies de façon suffisamment claire et précise par l'article 76 de la convention nationale signée le 26 juillet 2011"

 

Rappelons qu'aux termes de l'article 76 précité, les sanctions encourues sont :

 

-la suspension de la prise en charge des avantages sociaux

 

-la suspension du  droit permanent à dépassement ou du droit à pratiquer des honoraires différents.

 

-la mise hors convention 

 

  • Un décret inscrit, dans le Code de la santé publique, la possibilité d'obtention des diplômes d'Etat d'IBODE, d'aide-soignant, d'auxiliaire de puériculture et d'ergothérapeute par la validation des acquis de l'expérience

 

Un décret du 26 décembre 2014 insère au CSP des dispositions prévoyant la possibilité d'obtention des DE d'IBODE, d'aide-soignant, d'auxiliaire de puériculture et d'ergothérapeute par la validation des acquis de l'expérience (VAE).

 

Ces dispositions précisent par ailleurs que les modalités d'organisation de la VAE pour l'obtention de chacun de ces diplômes sont fixées par  un arrêté du ministre chargé de la santé.

 

Cependant il convient de préciser que cette possibilité d'accès à ces diplômes par la validation des acquis de l'expérience par un jury et les modalités d'organisation de cette dernière étaient déjà fixées par arrêté ministériel pour chacune de ces professions (arrêté du 25 janvier 2005 pour les aides soignants, arrêté du 16 janvier 2006 pour les auxiliaires de puériculture, arrêté du 18 août 2010 pour les ergothérapeutes et arrêté du 24 février 2014 pour les IBODE -voir nos observations précédentes sur ce dernier arrêté dans la présente rubrique).

 

Par ailleurs, le projet de décret prévoyait à l'origine la même possibilité d'obtention par VAE des diplômes d'Etat de masseur-kinésithérapeute, d'IADE, de puéricultrice, de pédicure-podologue, de psychomotricien, de manipulateur en électroradiologie médicale, de technicien de laboratoire médical et d’ambulancier.

 

Cette possibilité n'a pas été retenue, concernant ces professions, suite à un avis négatif du Haut conseil des professions paramédicales du 7 octobre 2014 après consultation des différentes organisations syndicales, car les projets d'arrêtés relatifs à la VAE concernant ces professions n'avaient pas été soumis.

 

Enfin, précisons ,à toutes fins utiles, que s'agissant des professions retenues par le décret, les différents arrêtés précités organisant la VAE prévoient que celle-ci peut aboutir soit à l'obtention du diplôme, soit n'être que partielle, le candidat ayant alors la possibilité, soit de compléter son expérience professionnelle avant de formuler une nouvelle demande de validation, soit de suivre les unités d'enseignement ou modules de formation correspondant aux compétences non validées.

 

  • Précisions sur l'exercice du droit de retrait d'une SCM de médecins

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Dans un arrêt récent du 17 juin 2014 (RG: 12/01071), la Cour d'appel de Nancy, a considéré que deux cardiologues retrayants d'une SCM qui se réinstallaient à 50 mètres ne pouvaient se voir reprocher un manquement au devoir de loyauté contractuelle.

 

En effet la cour d'appel rappelle  qu'une SCM  "n'est pas une société d'exercice en commun de la profession et a pour seul objet de mettre en commun les moyens nécessaires à l'exercice de la profession de ses membres à qui il ne peut être porté atteinte au libre exercice de leur profession après leur retrait de la société...".

 

Par ailleurs, la cour d'appel a considéré qu'aucun abus ne pouvait être reproché à ces praticiens dans l'exercice du droit de retrait.

 

La cour énonce que le "(...) droit de se retirer de la société ouvert par l'article 1869 du code civil aux associés de toutes les sociétés civiles est un droit intangible que les statuts peuvent seulement aménager ; que son exercice ne peut dégénérer en abus que si les retrayants ont agi sans intérêt pour eux dans l'unique dessein de nuire (...) "..

 

Et la cour d'appel d'ajouter qu' en l'espèce, alors que les praticiens expliquent que leur retrait de la SCM était motivé par leur mésentente avec ce dernier, il n'est démontré par aucun élément sérieux soit qu'ils avaient constitué cette société avec le troisième cardiologue dans le seul but de s'en retirer pour mettre celui-ci en difficulté, soit qu'après cette constitution ils ont décidé de manière concertée de s'en retirer avec ce même but ;

 

Le cardiologue est en conséquence débouté de ses demandes de dommages-intérêts.

 

Sur le premier point évoqué, relatif à la réinstallation des retrayants de SCM, il convient de rappeler qu'un arrêt de la Cour de cassation, ch commerciale du 1er mars 2011 avait confirmé un arrêt de cour d'appel ayant invalidé la clause de non concurrence insérée dans le règlement intérieur d'une SCM de masseurs-kinésithérapeutes, qui avait selon ses statuts, pour objet exclusif "la mise en commun de tous moyens matériels et utiles à l'exercice de la profession de ses membres",

 

La cour de cassation a considéré qu'avait justifié légalement sa décision la cour d'appel qui, avait retenu que cette clause de non-réinstallation ne pouvait être considérée comme conforme aux objectifs ainsi développés dans les statuts, et qui ajoutait que son application aboutirait à restreindre considérablement les droits des associés manifestant la volonté de se retirer, voire à vider de leur substance les dispositions statutaires qui régissent cette faculté de retrait, ces constatations et appréciations faisant ressortir que la stipulation litigieuse du règlement intérieur apportant des restrictions au libre exercice de leur profession par les associés retrayants , était incompatible avec les statuts de cette dernière.

 

L'arrêt de cour d'appel rappelle notamment que la SCM n'a pas de clientèle propre et n'est donc pas susceptible d'être protégée à cet égard.

 

Cette solution ne remet pas en cause les clauses de non concurrence souscrites dans les SCP ou les SEL qui ont pour objet l'exercice de la profession.

 

 

  • Le médecin remplacé ne répond pas des actes médicaux accomplis par le médecin remplaçant, lequel est tenu de souscrire personnellement une assurance civile professionnelle

 

Par Anne-Cécile Lemoigne

 

Dans un arrêt récent (Cour de cass, 1re chambre civile, 18 Juin 2014 – n° 13-13.349), la Cour de cassation nous rappelle les incidences du principe déontologique d'exercice personnel de la médecine en cas de dommage subi par un patient du fait d'un médecin remplaçant.

 

Dans cette affaire, un homme jeune, victime d'un infarctus du myocarde s'étant présenté dans la soirée au service des urgences d'un établissement de santé privé, a  été pris en charge par un médecin qui assurait le remplacement de son confrère, mais n'a vu son diagnostic posé que le lendemain matin et a été transféré dans un service spécialisé. Il a recherché la responsabilité du médecin remplaçant lequel a appelé en garantie, l'établissement de santé , le médecin remplacé et son assureur.

 

La Cour de cassation confirme l'arrêt de la Cour d'appel qui, a retenu que le médecin remplaçant, "...exerçant à titre libéral, il lui revenait de répondre seul des actes médicaux accomplis, sous couvert de l'assurance nécessaire à la réparation d'un éventuel dommage résultant de son exercice, sans pouvoir rechercher la garantie de la clinique ou( du médecin remplacé et de son assureur, de sorte qu'elle a implicitement mais nécessairement considéré que (le médecin remplacé), à qui n'incombait aucune obligation relativement à la responsabilité civile encourue par son remplaçant, n'avait pas commis de faute...."

 

La Haute Juridiction a écarté l'argumentaire du médecin remplaçant  qui faisait valoir  dans ses écritures, que le médecin remplacé avait l'obligation de s'assurer du chef des risques engendrés par l'activité du remplaçant qui exerçait pour son compte et accomplissait des actes facturés à son nom, et qu'il était d'usage que l'assurance du médecin remplacé bénéficie à son remplaçant.

 

Cet arrêt appelle plusieurs commentaires.

Il rappelle le principe déontologique, posé à l'article R.4127-69 du CSP qui prévoit que "L'exercice de la médecine est personnel" et que "chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes." . Le médecin remplacé n'est en conséquence pas responsable du fait d'autrui.

 

Par ailleurs, si par le passé certains contrats d'assurance souscrits par les médecins prévoyaient la garantie du remplaçant, depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (codifiée à l'article L.1142-2 du CSP) qui impose à tous les professionnels de santé libéraux de souscrire une assurance destinée à les garantir pour leur responsabilité civile, les médecins remplaçants ont l'obligation légale  de souscrire à titre personnel une assurance pour leur responsabilité civile professionnelle.

 

Cette obligation est d'ailleurs rappelée par le CNOM dans un document de septembre 2012 relatif aux remplacements, qui par ailleurs recommande en tout état de cause "...tant au médecin remplacé qu'à son remplaçant, de vérifier que, d'une manière ou d'une autre, le remplaçant sera effectivement assuré pour la responsabilité civile professionnelle..."

 

Par ailleurs, le modèle de contrat de remplacement du CNOM (1996) , outre ses  dispositions sur le principe de la responsabilité personnelle du remplaçant et l'obligation qui lui incombe de s'assurer personnellement à une compagnie notoirement solvable , prévoit par ailleurs qu'il doit apporter la preuve de cette assurance avant le début de son activité (par une attestation jointe au contrat de remplacement).

 

Pour compléter notre propos il convient de rappeler que si le médecin remplacé n'est pas tenu de s'assurer pour l'activité du remplaçant., il peut en revanche voir sa responsabilité engagée si une  faute personnelle peut lui être reprochée.

 

Il peut s'agir par exemple du choix d'un médecin remplaçant n'ayant pas les qualifications dans la discipline concernée ou encore non doté de l'expérience suffisante pour exercer la spécialité et la permanence des soins dans des conditions satisfaisantes : (Cour de cassation, 1ère civ., 25 mai 1987, 15-12541.).

 

Par ailleurs commet une faute le médecin remplacé en cas d'absence d'indications données au médecin remplaçant pour assurer la continuité des soins. Dans un arrêt du 20 juillet 1994, la 1ère chambre civile de la Cour de cassation a ainsi confirmé l'arrêt de cour d'appel ayant retenu la responsabilité pour moitié du médecin remplaçant (une étudiante) et du médecin remplacé, ce dernier ayant omis d'informer son remplaçant des particularités du traitement applicable à un patient et des précautions de manipulation, faute qui avait concouru à la réalisation du dommage subi par le patient.

 

 

 

Par une décision du 17 mars 2014 (n°353154), le Conseil d'Etat, vient d'annuler notamment certaines clauses de l'article 30 de la convention nationale des médecins généralistes et spécialistes du 26 juillet 2011

 

L'une des clauses litigieuses de cet article prévoyait que l'ensemble des associés exerçant au sein d'une société d'exercice "(...) doivent se déterminer de manière identique au regard de leur volonté ou non d'exercer dans le cadre de la présente convention (...)"'

 

Le Conseil d'Etat a estimé ces dispositions illégales en considérant que "(....) Si, en vertu des dispositions de l'article 1er de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 et de celles de l'article 1er de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, les sociétés civiles professionnelles (SCP) et les sociétés d'exercice libéral (SEL) ont pour objet l'exercice en commun de la profession de leurs membres, et si, en vertu respectivement des articles R. 4113-75 et R. 4113-20 du code de la santé publique, la société, comme les associés eux-mêmes, est soumise à l'ensemble des lois et règlements régissant les rapports de la profession avec l'assurance maladie, il n'en résulte pas, compte tenu des dispositions de l'article L. 162-15 du code de la sécurité sociale, que les médecins exerçant au sein d'une même structure juridique, qu'elle soit ou non dotée de la personnalité morale, devraient nécessairement être tous placés dans la même situation à l'égard de la convention nationale des médecins généralistes et spécialistes; que les parties à la convention n'avaient pas compétence pour imposer à l'ensemble des associés exerçant au sein de la société de se déterminer de manière identique au regard de leur volonté ou non d'exercer dans le cadre de la présente convention.(...)'

 

Au sein d'une même société d'exercice, pourront désormais coexister des médecins ayant fait le choix d'exercer dans le cadre conventionnel avec d'autres n'ayant pas fait un tel choix.

 

Il convient de souligner que l'article 30 prévoit par ailleurs que les médecins exerçant en société d'exercice "(...) adhèrent individuellement à la convention et, sauf dispositions contraires, conservent individuellement le choix et le bénéfice des options conventionnelles (...") que la convention prévoit.

 

A la liberté de choix d'adhérer ou non aux options conventionnelles (notamment choix du secteur), s'ajoute donc désormais à la faveur d'une annulation pour excès de pouvoir, celle du choix d'adhérer ou non à la convention.

 

D'autres dispositions de l'article 30 étaient attaquées, lesquelles prévoyaient que 'L'exercice de la médecine par un médecin salarié d'une société d'exercice ou d'un associé d'une société d'exercice est assimilé à de l'exercice libéral (...)"

 

Le Conseil d'Etat admet la légalité des dispositions assimilant le médecin salarié d'une société d'exercice à un médecin libéral en considérant qu'en adoptant ces dispositions les parties"... ont entendu viser les seules situations dans lesquelles des médecins, exerçant sous forme de société, ont opté pour le régime de l'assimilation aux salariés sur le plan social ou fiscal, sans pour autant avoir la qualité de salarié au sens du code du travail, et n'ont ainsi pas méconnu les dispositions de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale (...)"

 

Le Conseil d'Etat considère "(...) qu'en revanche, en tant qu'elles ont prévu qu'un médecin salarié d'un associé d'une société d'exercice doit être assimilé à un médecin exerçant à titre libéral et peut ainsi adhérer à la convention, les parties à la convention ont méconnu les dispositions de l'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale en vertu desquelles la convention détermine les obligations respectives des caisses primaires d'assurance maladie et des médecins d'exercice libéral (...) de sorte que ces dernières dispositions sont illégales.

 

 

Conformément à un engagement pris par la DGOS dans le cadre des travaux de réingénierie de la formation d'IBODE engagés en 2006, un arrêté du 24 février 2014 ouvre le DE d'infirmier de bloc opératoire à la procédure de validation des acquis de l'expérience (VAE).

 

Cet arrêté prévoit que le candidat souhaitant acquérir le diplôme d'Etat d'infirmier de bloc opératoire par la VAE doit justifier, d'une part, de la détention d'un des diplômes d'infirmier ou titres de formation prévus par l'article L. 4311-3 du CSP (titres de formation exigés en application pour l'exercice de la profession d'infirmier responsable des soins généraux) ou de l'une des autorisations d'exercice prévues par les articles L. 4311-4 de ce code et, d'autre part, des compétences professionnelles acquises dans l'exercice d'une activité salariée, non salariée ou bénévole, en rapport direct avec le contenu de ce diplôme

 

Le rapport direct avec le diplôme est établi lorsque le candidat justifie avoir réalisé des activités dans chacun des quatre domaines suivants :

 

-au moins trois activités dans le domaine intitulé « réalisation de soins et d'activités liées à l'intervention et au geste opératoire » ;

 

-au moins deux activités dans le domaine intitulé « réalisation de soins auprès d'une personne bénéficiaire d'une intervention » ;

 

- au moins trois activités dans le domaine intitulé « mise en œuvre et contrôle de mesures d'hygiène en bloc opératoire et dans les secteurs associés » ;

 

-au moins deux activités dans le domaine intitulé « mise en œuvre de mesures de qualité et de sécurité en bloc opératoire et dans les secteurs associés ».

 

Le candidat doit avoir exercé les activités pendant au moins trois années en équivalent temps plein de façon consécutive ou non. Les activités sont décrites dans le référentiel d'activités figurant en annexe I de l’arrêté.

 

Cette procédure de VAE (que l'arrêté détaille) permet donc une reconnaissance des compétences spécifiques des infirmiers travaillant en bloc opératoire depuis au moins trois ans.

 

Le champ d'intervention et les fonctions spécifiques des IBODE sont actuellement définis à l'article R.4311-11 du CSP (qui énumère les activités en priorité exercées par des IBODE, évoque leurs fonctions d'instrumentiste, circulante et aide-opératoire et liste leurs secteurs d'intervention).

 

A l'avenir, des missions supplémentaires pourraient être confiées aux IBODE donnant lieu à un décret en Conseil d'Etat.

 

 

Dans le prolongement de son livre blanc relatif à la déontologie médicale sur le web de décembre 2011, le CNOM vient de publier en ligne fin janvier une charte de conformité déontologique applicable aux sites web professionnels des médecins.

 

Le CNOM engage les médecins à respecter les dispositions de cette charte et à la publier sur leur site web professionnel.

  

Les sites web professionnels des médecins sont les sites qui se rattachent directement à l'exercice de leur profession. Ne sont pas concernés les blogs qui font l'objet de recommandations spécifiques dans le livre blanc.

 

La charte a vocation à s'appliquer non seulement au site professionnel de tout médecin mais aussi à tout portail en exercice regroupé, qu'il s'agisse d'un exercice à titre libéral, à titre hospitalier ou salarié.

 

En effet, le CNOM rappelle les termes de l'article R.4127-20 du CSP qui prévoit que "Le médecin doit veiller à l'usage qui est fait de son nom, de sa qualité ou de ses déclarations.

 

Il ne doit pas tolérer que les organismes, publics ou privés, où il exerce ou auxquels il prête son concours utilisent à des fins publicitaires son nom ou son activité professionnelle".

 

Le conseil national rappelle , "(...)l'exercice de la médecine ne doit pas être pratiqué comme un commerce, y compris le commerce électronique. En conséquence  le site d'un médecin ne doit pas être de nature publicitaire et ne doit publier que des informations de qualité au service de l'information du public, des patients, des professionnels de santé ou des confrères."

 

La prohibition de l'exercice de la médecine comme un commerce et de la publicité posée par l'article R.4127-19 du CSP doit en effet être prise dans une acception large incluant les nouveaux modes de communication (notamment électroniques)

 

La charte aborde notamment les points suivants: l'adresse du site, la présentation du médecin, l'agenda en ligne, la présentation du cabinet ou de la structure de regroupement, la présentation de l'activité (en distinguant les mentions obligatoires des mentions qui peuvent y figurer), et enfin le rappel des obligations de la loi.

 

Nous vous invitons à vous y reporter

 

 

La chambre criminelle de la Cour de cassation a confirmé récemment la condamnation pour délit d'omission d'empêcher une infraction d'un médecin attaché au pôle gérontologique d'un hôpital qui est demeuré passif alors qu'il avait connaissance d'actes de maltraitance physiques et psychiques répétés commis par plusieurs membres du personnel soignant.

 

Cette condamnation intervient après une longue procédure judiciaire où un débat sur la levée du secret médical a été mené.

 

Dans un premier temps, le tribunal correctionnel du Mans, avait condamné ce médecin (ainsi qu'un cadre de santé et le directeur adjoint) à 1 an d'emprisonnement avec sursis pour non dénonciation de mauvais traitements sur personnes vulnérables.

 

Le médecin ,ayant seul formé appel, avait invoqué une option de conscience lui permettant de choisir entre la dénonciation et le secret médical mais avait vu sa condamnation confirmée par la cour d'appel d'Angers

 

Le 27 avril 2011, la Cour de cassation avait annulé cet arrêt en considérant que l'ensemble des informations relatives aux patients venus à la connaissance du médecin, y compris par l'intermédiaire de tiers, était couvert par le secret médical.La Cour de cassation précisait que le juge du fond, avant de condamner le médecin, aurait dû rechercher si le prévenu avait reçu l'accord des victimes, condition imposée, pour la levée du secret médical, par l'article 226-14 2° du code pénal, dans sa rédaction applicable à la date des faits;

 

La cour d'appel de Rennes a alors requalifié les faits en omission d'empêcher une infraction prévue par l'article 223-6 alinéa 1 du code pénal, constitué lorsque quiconque "...pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement de le faire ..."et l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis.

 

La Cour de cassation confirme l'arrêt de cour d'appel et fait référence à la motivation de ce dernier qui, pour déclarer le prévenu coupable du délit d'omission d'empêcher une infraction prévu, a relevé ".., en substance, que le Dr X..., sachant que plusieurs membres du personnel avaient un comportement maltraitant envers des pensionnaires âgés et dépendants, s'est abstenu d'intervenir auprès de l'encadrement des infirmiers, même s'il n'avait pas autorité sur le personnel soignant, afin que soient prises des dispositions, telles qu'une meilleure surveillance, tendant à prévenir le renouvellement de faits constituant des atteintes à l'intégrité de personnes hospitalisées ; que l'arrêt ajoute qu'en cas d'échec de cette démarche, il lui appartenait de s'entretenir de la situation avec la direction de l'hôpital afin que la qualité des soins prodigués aux pensionnaires soit préservée par des mesures appropriées..."

 

La Cour de cassation rejette le pourvoi en considérant que la cour d'appel a sans méconnaître le principe du secret médical, caractérisé les éléments constitutifs du délit.

 

Le médecin ne peut donc utiliser le secret professionnel comme une excuse et l'inertie coupable demeure pénalement sanctionnée lorsqu'il dispose d'autre moyens d'agir que la dénonciation aux autorités judiciaires, sans risque pour lui ou autrui.

 

Par ailleurs, il convient de signaler que depuis l'époque où les faits ont eu lieu l'article 226-14 (2°) dans sa nouvelle rédaction permet désormais au médecin, sans être passible du délit de violation de secret professionnel, de dénoncer au Procureur de la république des sévices physiques ou psychiques sur un mineur ou une personne hors d'état de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique sans avoir à requérir son accord alors que dans les autres cas l' accord de l'
intéressé est requis.

 

La solution du litige en eût peut être été différente.

 

Il convient de mettre en relief la solution, qui repose sur l'application de dispositions du code pénal, avec les obligations déontologiques du médecin issues de l'article R4127-44 du CSP,  qui prévoient que :

 

"Lorsqu'un médecin discerne qu'une personne auprès de laquelle il est appelé est victime de sévices ou de privations, il doit mettre en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection.

 

Lorsqu’il s’agit d’un mineur ou d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique, il alerte les autorités judiciaires ou administratives sauf circonstances particulières qu’il apprécie en conscience."

 

Le devoir de protection de tout patient victime de maltraitance impose donc au médecin de ne pas demeurer passif face aux sévices connus de lui, en ayant recours le cas échéant au signalement mais en choisissant en tout état de cause la réponse appropriée et sans se départir d'une attitude réfléchie.

 

Le devoir de protection est toutefois renforcé pour les personnes vulnérables où il existe une obligation de signalement sauf circonstances particulières.

 

  • De la valeur juridique des recommandations de bonnes pratiques médicales...

 

A l'occasion de son étude annuelle sur le Droit souple publiée en octobre 2013, le Conseil d'Etat, consacre une fiche thématique  (p 4) sur la portée juridique qu'il convient d'accorder aux recommandations de bonnes pratiques médicales, lesquelles sont principalement produites par la Haute autorité de santé ainsi que par l'Agence nationale de sécurité du médicament et les sociétés savantes.

 

Les recommandations de bonnes pratiques médicales sont en effet identifiées dans l'étude comme constituant un des domaines significatifs d'utilisation du droit souple.

 

De nos jours, "le droit souple est de plus en plus employé pour couvrir un ensemble de dispositifs très hétérogènes (directives, circulaires, avis, chartes, guides de déontologie, codes de conduite, recommandations d’autorités administratives indépendantes, …) qui ont pour point commun de ne pas imposer d’obligations précises ...".

 

Ce terme regroupe l’ensemble des instruments répondant à trois conditions cumulatives :

                       
 -ils ont pour objet de modifier ou d’orienter les comportements de leurs destinataires en suscitant, dans la mesure du possible, leur adhésion (à la différence des avis ou autres documents préparatoires à l'élaboration d'une règle de droit comme par exemple les livres blancs);

 

-ils ne créent pas par eux-mêmes de droits ou d’obligations pour leurs destinataire;

 

-ils présentent, par leur contenu et leur mode d’élaboration, un degré de formalisation et destructuration qui les apparente aux règles de droit.

 

Le Conseil d'Etat formule dans cette étude un certain nombre de propositions pour un emploi raisonné du droit souple, notamment pour contribuer à la politique de simplification des normes et à la qualité de la réglementation (par exemple par la possibilité qu'il offre de rédiger des textes législatifs ou réglementaires plus brefs).

 

Il précise que "Dans le secteur médical, le professionnel de santé doit pouvoir s'écarter d'une recommandation  lorsqu'il considère que la situation particulière du malade le justifie : le recours au droit souple apparaît dès lors plus approprié que le droit dur".

 

Cette position du Conseil d'Etat constitue une illustration de la liberté de prescription (à la fois thérapeutique et de diagnostic) dont bénéficie déontologiquement tout médecin en application de l'article R.4127-8 du CSP, 1er alinéa.

 

Cet article prévoit en effet que ""Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu'il estime les plus appropriées en la circonstance...".

 

Dans les commentaires de cet article, le Conseil national de l'ordre des médecins considère ainsi que "..Comme l'indépendance du médecin (article 5), sa liberté de prescrire est soumise aux données acquises de la science. Il revient au médecin d'appliquer ces données générales à un patient particulier et cela l'amène, parfois, à nuancer la règle : il est alors souhaitable que cet écart soit argumenté par des raisons objectives...".

 

Le Conseil d'Etat conclut cette fiche en rappelant sa position juriprudentielle issue de l'arrêt du 27 avril 2011, Formindep, selon laquelle les RBP médicales, bien que dénuées de caractère contraignant, n'en sont pas moins des décisions faisant grief et, en cela, susceptibles d'être contestées devant le juge administratif.

 

Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat avait en effet considéré que les recommandations de bonnes pratiques élaborées par la HAS sur la base des articles L.161-37 et R.161-72 du code de la sécurité sociale "...ont pour objet de guider les professionnels de santé dans la définition et la mise en oeuvre des stratégies de soins à visée préventive, diagnostique ou thérapeutique les plus appropriées, sur la base des connaissances médicales avérées à la date de leurédiction ; qu'eu égard à l'obligation déontologique, incombant aux professionnels de santé en vertu des dispositions du code de la santé publique qui leur sont applicables, d'assurer au patient des soins fondés sur les données acquises de la science, telles qu'elles ressortent notamment de ces recommandations de bonnes pratiques, ces dernières doivent être regardées comme des décisions faisant grief susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ...."

 

Ainsi, malgré leur nature non péremptoire, le médecin ne peut jamais totalement s'abstraire des dites recommandations de bonnes pratiques dès lors que les données acquises de la science, dont le respect lui incombe déontologiquement, résultent notamment de celles-ci.

 

 

Les ordres professionnels chargés d'assurer le respect des devoirs incombant aux membres des professions en lien avec la santé publique disposent de deux facultés notables que sont le pouvoir de se constituer partie civile et le pouvoir disciplinaire.

 

Cette circulaire répond à un souci d'amélioration des relations entre les parquets et les ordres des professions de santé et à '"l'impérieuse nécessité d'améliorer l'articulation entre les poursuites disciplinaires et pénales".

 

Sont concernés les ordres des professions de santé régis par les dispositions du CSP : médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, infirmier, masseur-kinésithérapeute et pédicure-podologue.

 

La circulaire a pour objet de présenter les interlocuteurs des parquets au sein des différents ordres professionnels et leurs prérogatives et de rappeler les informations qui doivent être échangées entre les parquets et les ordres professionnels (au stade de l'enquête, de l'instruction et du renvoi devant la juridiction de jugement mais également après la condamation du professionnel par une juridiction répressive ou disciplinaiire .

 

Elle distingue : 

 

-les informations devant faire l'objet d'une communication aux ordres professionnels en raison d'une obligation légale (lorsque l'enquête pénale a été réalisée à la suite d'un signalement ou d'une plainte émanant d'un ordre professionnel  ou lorsque l'ordre professionnel est susceptible de se constituer partie civile durant l'enquête ou l'instruction);

 

-les informations pouvant faire l'objet d'une communication par le procureur de la République en opportunité (par exemple, la communication d'informations relatives à des limitations d'exercice professionnel prononcées dans le cadre de contrôle judiciaire).

 

S'agissant de la question des informations échangées entre les ordres professionnels et le procureur de la République après la condamnation du professionnel par une juridiction répressive ou disciplinaire, la circulaire aborde le point de la communication des décisions de justice et  celui de l'inscription au casier judiciaire des condamnations disciplinaires prononcées par les ordres professionnels.

 

DEVELOPPEMENT PROFESSIONNEL CONTINU

  • Arrêté du 25 juillet 2013 relatif au modèle d'attestation délivrée par un organisme de développement professionnel continu à un professionnel de santé justifiant de sa participation à un programme de développement professionnel continu (publié au JO du 3 août 2013 ) 

le développement professionnel continu (dit DPC) est un dispositif d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins associant la formation continue et l'évaluation des pratiques professionnelles.

 

La loi HPST (article 59) instaure l'obligation de DPC pour l'ensemble des professionels de santé.Ceux-ci doivent satisfaire à leur obligation en participant au cours de chaque année civile à un programme de DPC collectif annuel ou pluriannuel

 

Cet arrêté fixe en annexe le modèle auquel doit se conformer l'attestation délivrée à un professionel de santé au titre de l'année civile par un organisme de DPC justifiant de sa participation à un programme de développement professionnel continu.

 

Pour procéder au contrôle de son obligation cette attestation est simultanément transmise par l'organisme de DPC, selon le cas, au conseil de l'ordre  compétent(pour les professions médicales et auxiliaires médicaux libéraux qui disposent d'un ordre), à l'employeur d'un auxiliaire médical, aide soignant ou auxiliaire de puericulture salarié du public ou privé,ou à l'ARS (pour les prothésistes et orthésistes n'exerçant pas à titre salarié et les autres auxiliaires médicaux libéraux